Sa marque de fabrique ? L’analyse sans concessions. Sa force ? Le franc‐parler. Son terrain de prédilection ? Le football. Mais Pierre Ménès, consultant bien connu des passionnés de ballon rond, est aussi un grand fan de tennis. GrandChelem/Welovetennis a rencontré, pour vous, cet amoureux transi d’un certain Suisse… admirateur, aussi, d’un certain Espagnol. Entretien.
Pierre, ton job, c’est de parler de foot, mais je crois savoir que tu suis un peu le tennis… Quel est ton rapport avec la petite balle jaune ?
Plutôt tendu (rires) ! Je regarde pratiquement autant de tennis que de football. En fait, j’ai joué au tennis quand j’étais jeune, en Seine‐et‐Marne. J’avais un entraîneur roumain – et pas n’importe lequel, puisqu’il avait été remplaçant lors de la fameuse finale de Coupe Davis opposant la Roumanie aux Etats‐Unis en 1972. Il m’a appris à jouer sur moquette, ma surface fétiche. J’ai réussi à accrocher quelques 15⁄2 dessus… Ce n’est pas mal, non (sourire) ? Sur terre battue, en revanche, je ne me rappelle pas avoir battu mieux qu’un 30/2… Dans l’ensemble, comme je suis gaucher, j’ai usé et abusé du fameux service qui va avec.
Tu étais fan de qui, à l’époque ?
De Jimmy Connors, pour sa hargne et sa combativité. Paradoxalement, j’aimais le voir pratiquer un type de jeu que je n’ai jamais voulu imiter. Ou alors que je n’ai jamais pu imiter (rires).
Certains parlent de l’époque de Borg, Connors ou McEnroe comme de l’âge d’or du tennis, estimant qu’aujourd’hui, les champions sont trop lisses…
Qu’ils soient lisses ou pas, je m’en fous ! Quoi qu’on dise, la qualité du tennis actuel est juste incroyable. Que les mecs soient démonstratifs, ce n’est pas le plus important, le niveau a tellement évolué depuis des années. Par le passé, un joueur du top 10 ne pouvait pas être inquiété lors des premiers tours d’un tournoi. Maintenant, cela n’est plus le cas. Un 100ème mondial peut pratiquement battre n’importe qui sur un match. Pour moi, c’est aussi ce qui caractérise le tennis moderne. C’est pour cette raison que les joueurs du top 10 ont encore plus de mérite d’être là où ils sont. J’en suis très admiratif, car j’imagine le travail accompli pour se maintenir à ce niveau.
On fait un gros plan sur les fans de Nadal à l’occasion de la sortie de notre livre « Rafa, mon amour ». Quel regard tu portes sur ce joueur ?
Tout le monde sait que je suis un grand fan de Roger, mais je ne peux pas rester insensible à Rafa. Déjà, il y a sa prise de raquette… Elle m’a toujours sidéré – et le mot est bien choisi ! Après, comment ne pas parler de son coup droit avec ce coude qui part en l’air et cette gifle, ce fameux lasso… C’est un défi aux lois de la physique. Esthétiquement, cela me touche beaucoup moins que la pureté et la simplicité de Roger Federer, mais Rafael Nadal reste un champion charismatique qui n’a pas fini de marquer l’histoire de sa discipline. Sa rivalité avec Roger demeure, pour moi, une période tout simplement magnifique.
Les critiques émises dernièrement au sujet de Federer ont dû te toucher…
Oui, et j’ai envie de dire : laissez‐le tranquille. S’il y a un mec qui a bien le droit de jouer autant qu’il veut, quels que soient ses résultats, c’est lui. Il nous a tellement donné d’émotions qu’il le mérite ! Vous avez vu son âge ? A 32 ans, il est l’un des seuls à réussir à se maintenir à ce niveau. Pete Sampras a gagné l’US Open à 31 ans, mais il n’a finalement fait qu’un come back éclair. On peut citer aussi Jimmy Connors qui a continué jusqu’à la quarantaine, mais il n’a pas joué les premiers rôles, en‐dehors d’une demi‐finale à l’US Open en 1991… La seule comparaison valable, c’est Andre Agassi.
« Tout le monde sait que je suis un grand fan de Roger, mais je ne peux pas rester insensible à Rafa »
On te sent fervent défenseur du Suisse…
Fan, en fait. Un vrai. Il m’arrive encore de regarder le premier set de sa demi‐finale contre Djokovic à Roland Garros 2011. Pour moi, à ce moment‐là, on est proche de la perfection federienne. Que Roger gagne ou pas quelque chose dans les années à venir, je m’en tape, je profite juste de lui tant qu’il est sur un court en bonne forme physique.
Si tu avais un coup de Roger à retenir…
Ses improbables demi‐volées de fond de court ! Pour moi, Roger, c’est cela…
Finalement, tu es un peu comme tous les Français : fan de Federer (sourire). Pour autant, tu n’es pas anti‐Nadal, alors que le public tricolore, lui…
Tout à fait, j’ai beaucoup de respect pour Rafa et je t’ai expliqué pourquoi. D’ailleurs, tous ceux qui l’ont approché m’ont expliqué que c’était un garçon absolument incroyable, gentil, serviable, sympathique, humble, abordable… Et, moi qui suis dans le football, je sais ce que cela veut dire ! Quant à cette idée d’un mouvement anti‐Nadal, je dirais qu’en France, d’une manière générale, on n’aime pas qu’un athlète domine outrageusement. Or, lui, il est dans ce cas et, pis, à Roland Garros, notre monument national. L’autre souci, ce sont les doutes qu’émettent certains sur l’origine de sa puissance physique.
Toi aussi, tu t’es posé cette question ?
Evidemment ! Mais je sais aussi que Rafael Nadal s’impose des charges de travail incroyables à l’entraînement.
Pour l’instant, je te trouve plutôt sympathique avec la petite balle jaune alors que tu es connu pour distribuer quelques gifles à droite, à gauche, avec ton franc‐parler… Il doit quand même y avoir un joueur qui t’énerve !
‘Fallait pas me lancer cette perche (rires). S’il y a un mec que je ne peux pas voir en peinture, c’est Andy Murray. Il est truqueur, il se plaint, il a un coach qui ne sait pas sourire (NDLR : Ivan Lendl)… Bref, tout ce que j’aime. Regarder Murray, c’est une vraie souffrance.
On imagine que tu es proche de certains Tricolores…
Tout à fait, je communique souvent avec Gasquet, que je connais bien. D’ailleurs, plus le temps passe, plus je trouve que Richard parvient à se libérer, à être lui‐même. Il l’a prouvé cette année. J’aime aussi beaucoup Gaël Monfils. Selon moi, c’est lui qui a le meilleur potentiel pour gagner, un jour, un tournoi du Grand Chelem. Mais bon, on sait aussi que Gaël… c’est Gaël.
Tu aimerais commenter du tennis ?
Cela me ferait plaisir, bien sûr, mais bon… c’est Canal Plus, pas Canal Pierrot (sourire). Néanmoins, faire une demi‐heure si on me le permet, ce serait un beau cadeau, car – je crois que tu l’as compris – je suis un vrai fan de tennis…
Et tu as encore le temps de taper la balle ?
J’essaie, je suis même parvenu à faire sortir Tatiana Golovin de sa retraite… J’ai donc un fort pouvoir de persuasion (rires). C’était au TC Paris, on a bien rigolé.
C’est la seule star avec laquelle tu as partagé un court ?
Non, j’ai aussi joué avec Rodolphe Gilbert et Henri Leconte. Ce qui est fantastique quand tu joues avec un ex‐champion, c’est que la balle qu’il t’envoie est tellement propre que tu joues super bien. Comme dans un rêve !
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Publié le jeudi 21 novembre 2013 à 13:40