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La France, la meilleure forma­tion du monde

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Trois témoins face aux quatre ques­tions qui tuent de l’in­ter­view de Patrick Mouratoglou, GrandChelem a tiré quatre problé­ma­tiques concrètes. 1) Pourquoi le monde entier répète que la France a la meilleure forma­tion du monde ? 2) En consè­quence, où se situe notre problème : dans la tête ? 3) Quelle doit désor­mais être la place des parents dans la réus­site de leurs enfants ? 4) Quels ensei­gne­ments précis tirer de l’ex­tra­or­di­naire réus­site de la famille Williams ? Pour répondre à ces ques­tions, nous sommes allés voir trois témoins clef : Patrice Dominguez, respon­sable de la direc­tion tech­nique natio­nale, Alain Solvès, le respon­sable du programme Avenir National et Scott Silva, le papa de Jan Silva, ce petit prodige arrivé à 5 ans en France et que son père annonce comme étant le futur Tiger Woods du tennis.

Patrice Dominguez

Le système à la fran­çaise produit une masse de joueurs dotés d’une excel­lente tech­nique. Ce n’est pas nous qui le disons, c’est la concur­rence. On ne va pas se lancer des fleurs mais tech­ni­que­ment les Français sont très en place.15 joueurs et 11 joueuses dans les cent premiers et autant entre la centième et la deux centième place, ça veut dire qu’on sait former des joueurs. Après ça, il faut trans­former le compé­ti­teur moyen en cham­pion puis en super crack, et c’est une autre exigence. Sur le plan physique, on a fait un énorme travail pour que tout le monde ait les pré requis pour tenir 20 tour­nois par an, enchaîner Roland et Wimbledon, avoir une vraie caisse physique. Trois fois par an, le CNE va faire passer des tests de vali­da­tion sur les indi­ca­teurs physiques de chacun. Après on entre dans un monde d’adulte. Le défaut de la société fran­çaise, c’est que c’est une société formi­da­ble­ment orga­nisée mais confor­table. Il y a égale­ment notre système de clas­se­ment hyper sophis­tiqué. On a dépé­na­lisé la défaite donc on a encou­ragé la compé­ti­tion mais on obnu­bile tout le monde avec le clas­se­ment alors qu’on devrait se fixer sur l’ob­jectif final. C’est pour ça que ceux qui ont un peu de sang étranger comme les Golovin, les Pierce réus­sissent mieux et plus tôt. Ils mêlent la tech­nique à la fran­çaise au sens du risque en compé­ti­tion. Il reste donc un travail d’exi­gence sur le mental. Prenez Monfils, il a tout, le jeu, le physique à 120 % mais il n’ar­rive pas à se situer par rapport à sa vie ou à ses contem­po­rains comme Gasquet. Il a un problème et il ne le règlera que dans un an et demi, comme les autres. C’est dommage parce que moi j’écoute un de mes maîtres, Aimé Jacquet, qui dit qu’entre 18 et 21 ans, on peut encore travailler sur la marge et le déve­lop­pe­ment de qualités supé­rieures, mais après on ne fait plus que de la récupération. 

Alain Solvès

La qualité de la foma­tion fran­çaise vient d’une chose assez simple : la qualité des ensei­gnants. En France le niveau de l’en­sei­gne­ment est celui qui demande le plus haut niveau d’ex­per­tise. On a été à l’époque de Gil de Kermadec (ancien DTN, photo­graphe et réali­sa­teur) les initia­teurs de la méthode fran­çaise. Même si elle a évolué, la culture, les examens qui sont demandé avec les démons­tra­tions sur le terrain, justifie une vraie connais­sance de la tech­nique ce qui n’est pas le cas dans tous les autres pays. Il n’y a pas les mêmes pré‐requis à l’étranger. La deuxième chose, c’est qu’on est convaincu qu’il y a un âge d’or de la progres­sion où on peut insister sur le fait qu’il n’y ait pas de limites tech­niques pour aller au plus haut niveau. C’est une vision fran­çaise même si on sait que ça ne jouera pas que là. La balle de match ne sera pas jouée sur une ques­tion de tech­nique ou d’es­thé­tique. Si je parle de l’es­thé­tique, c’est qu’on nous donne l’image d’un appren­tis­sage de la tech­nique sous un objectif d’es­thé­tique, alors que notre approche est pure­ment méca­nique, tournée vers la préven­tion des bles­sures. C’est un langage d’ef­fi­cience. Nous on ne met pas une note artis­tique à la fin. En revanche on sait que pour jouer au tennis, il ne faut pas être blessé et si on prend un Gasquet, il rentre dans le top 10 parce que c’est l’année où il joue deux fois plus que les autres années. Pour la première fois, il engage une année complète parce qu’il n’est pas blessé.