Même s’il s’agit de ne pas s’enflammer sur les conséquences à long terme du revers de l’Espagnol, il est aussi utile de tirer quelques conclusions de la surprenante élimination de Rafael Nadal face à Lukas Rosol au deuxième tour de Wimbledon 2012.
1) Rosol, cet inconnu
« Il ne doit pas jouer comme cela tout le temps », Lionel Roux au micro de Canal Plus n’en croyait pas ses yeux, mais aussi ses oreilles. L’entraîneur de l’équipe de France, plutôt incrédule, pointait là une qualité de balle exceptionnelle mais aussi un sens tactique venu de nulle part. Et là où la magie a tenu c’est que Lukas n’a jamais dérogé à cette ligne de conduite tout en gardant un niveau de jeu hallucinant. Frappant souvent droit devant lui et plus rarement croisé, il a mis Rafael Nadal sur tous les points en position défensive. Si l’on rajoute à cela une première balle karloviste que l’Espagnol découvrait on comprend aisément pourquoi l’exploit a pu être possible.
2) Ne pas permettre à Rafa de transpirer
On ne saura jamais si c’était une vraie tactique ou une limite de sa capacité à se concentrer sur tous les points, en tout cas Lukas avait un plan. Celui de breaker le plus vite possible, puis de se concentrer uniquement sur sa mise en jeu. A tel point que cela pouvait presque devenir comique, voir considéré comme du « no game ». Ce petit jeu lui permettait peut‐être de se délasser tout en laissant Rafael Nadal dans le flou. On le sait, pour que Rafa soit dans son jus, il lui faut du rythme et quelques frappes, quelques rallies. Lors de ce duel, on est rarement allé au delà des cinq coups de chaque côté. Lukas Rosol a privilégié les trajectoires tendues, et lorsque cela s’éternisait un peu, il tentait un coup presque impossible.
3) Une interruption qui a profité au Tchèque
Le point de passage du quatrième set se situe sur ce penalty que rate Lukas transformé en lob millimétré par Nadal. Alors qu’il n’avait jamais manqué d’assommer son adversaire, le Tchèque, sur sa mise en jeu, est la proie du doute, il se fait breaker une fois et son château de cartes s’écroule puisqu’il perd à nouveau sa mise en jeu. Pour un gros serveur, c’est la vraie panne et le début de la gamberge. Heureusement, l’arrêt va lui permettre de prendre conscience qu’il ne s’agit plus que de gagner un set et que la dynamique espagnole n’existe plus, stoppée par une interruption de plus de 40 minutes. Quand il revient sur le central couvert, Lukas a retrouvé sa filière et son premier retour de service met Nadal sur la défensive. La suite, on la connaît. Il fait le break d’entrée et envoie du lourd, certains disent du « fat », pour conclure la rencontre.
4) Un Roland Garros qui va peser lourd
On ne mesure pas assez l’énergie mentale dépensée avant, pendant et au cours des deux jours de la finale de Roland Garros, par Rafael Nadal. Toute cette nervosité accumulée et cette forme de frustration lors d’un week‐end interminable va peser lourd cette saison. Avant le tournoi, au sein de la rédaction, je me suis permis un pronostic plutôt offensif : « Ce ne sera ni Nadal, ni Djokovic, ni Federer qui remportera ce Wimbledon. » A propos de Djokovic, je me permets la même analyse qu’avec l’Espagnol. Un seul bémol : la défaite sur l’ocre peut aussi lui donner une nouvelle envie, même si je pense que lui aussi est usé par un début de saison très éprouvant. Quant à Federer, le choix est plutôt osé, mais sa performance face à Nole était tellement faible en demi‐finale à Paris qu’on doute un peu de sa capacité à pouvoir rester à un très haut niveau sur toute une quinzaine. Il ne vous reste plus qu’à faire un choix parmi les outsiders qui suivent… Wimbledon a souvent accouché, par le passé, d’un vainqueur surprise. Cela perpétuerait l’idée de l’atypisme vert du gazon londonien. Et malgré tout, ce serait encore une bonne nouvelle pour le tennis masculin.
Publié le vendredi 29 juin 2012 à 13:40