Tous les passionnés attendaient un vrai film de tennis. Avec Borg‐McEnroe ce vœu a été exaucé. Cette plongée dans l’âge d’or du tennis se révèle jouissive surtout quand certains détails de spécialistes sont respectés. Revue en cinq points très précis de ce qui fait la force de ce Borg‐McEnroe à ne manquer sous aucun prétexte.
Des acteurs efficaces et incarnés
« Dès le début j’ai pensé à Shia Labeouf pour interpréter John McEnroe, il a cette énergie qui était caractéristique du joueur américain » explique Janus Metz. Et on le comprend tant le rôle était difficile à résumer. Shia Laboeuf s’en sort bien même si c’est Sverrir Gudnason, la star du film puisqu’il s’agit quand même du biopic de Bjön Borg. L’acteur islandais est juste une incarnation quasi parfaite du suédois avec cette tranche de mystère, cette inquiétude permanente, et ces rituels surréalistes, cette froideur viking. Autant dire que l’on adhère tout de suite. On devient supporter d’un champion en plein doute, star sans l’être, regardant défiler devant lui une hystérie collective dont il ne comprend pas le sens. On notera aussi le rôle important de Stellan Skarsgärd qui incarne le coach légendaire du suédois Lennart Bergelin. Juste et précis, il trace déjà les contours de ce qu’est un coach pour un joueur de haut niveau avec une justesse dans les attitudes que ne nieraient pas les grands entraîneurs actuels comme Toni Nadal par exemple.
Le mystère Björn Borg enfin éclairci
Comme Roger Federer, dans sa jeunesse, Björn Borg n’acceptait ni la défaite, ni l’échec. À tel point que son comportement anti‐sportif aurait pu briser sa carrière. Cette partie du champion est un peu ignorée des spécialistes et le réalisateur la met en avant en ayant la finesse de faire joueur le rôle du Björn Borg jeune par son fils Léo. Tout prend alors une autre dimension, et l’on comprend alors que si Björn Borg devient impassible et calme en tant qu’adulte c’est pour mieux contrôler le volcan qui existe en lui. Son adversaire et rival a eu lui le chemin inverse comme l’a expliqué John Mc Enroe lui même : « Contrairement à Björn Borg on ne m’a pas interdit de jouer au tennis pendant six mois quand j’étais jeune. Je ne me suis jamais mal comporté sur un court en tant qu’adolescent, c’est par la suite que cela s’est gâté sauf face à un seul adversaire Björn Borg. »
Trois rivalités, trois époques, trois tendances
Borg‐McEnroe, pop tennis et rock stars
Si le film retrace surtout la vie de Björn Borg à travers sa rivalité avec John McEnroe, il pose aussi l’idée réelle que le sport se sublime quand deux adversaires donnent le meilleur d’eux‐mêmes surtout quand leurs styles se complètent. Avec Borg‐McEnroe, on a donc tous les ingrédients de ce schéma et ce n’est pas un hasard si cette rivalité a pris une dimension planétaire.
Sampras‐Agassi, business is business
Si Björn Borg et John McEnroe ont donné une dimension sociétale à leur rivalité, celle de Pete Sampras et André Agassi n’a pas pu franchir ce palier. Il fallait donc se contenter du court pour magnifier leur rivalité. D’ailleurs, si Borg et McEnroe se sont toujours respectés et sont même devenus des amis pour la vie ce n’est pas le cas de Sampras et Agassi. Si André Agassi, grâce à son livre Open, a pris une vraie dimension en tant qu’homme, Pete Sampras reste là ou il était, presque nulle part sauf sur les palmarès, et c’est déjà beaucoup pour un joueur de tennis.
Rafael Nadal – Roger Federer, pour l’éternité
Palmarès inégalé, aura internationale surdimensionnée, le duo Federer‐Nadal est un rouleau compresseur. D’abord dans les chiffres des titres accumulés par les deux champions mais aussi par la vraie fraternité qui existe dans leur relation. Combattants sur le court mais complices en dehors, ayant compris qu’ils étaient avant tout des ambassadeurs de leur discipline. Reste maintenant à savoir si cette amitié perdurera quand ils auront décidé de ranger leurs raquettes au placard.
Borg‐McEnroe, ouvrez grand les yeux (1÷2)
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Publié le jeudi 19 octobre 2017 à 18:00