AccueilDocuSumyk : "Je veux absolument conserver l’esprit du débutant"

Sumyk : « Je veux abso­lu­ment conserver l’esprit du débutant »

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Il est le plus célèbre globe‐trotter trico­lore. Il était donc logique de donner la parole au coach de Garbiñe Muguruza, d’autant que sa vision nous permet toujours de voir au‐delà de l’horizon et de certains clichés.

Sam, aujourd’hui, te considères‐tu comme Français, citoyen du monde ou Breton ?

Curieux, cette première ques­tion… Je me suis consi­déré à l’origine comme Frenchie, un peu Breton, puis quand j’ai migré vers les États‐Unis, je suis natu­rel­le­ment devenu citoyen du monde. Depuis, j’aurais tendance à inverser cet ordre.

Quand et pour­quoi as‐tu pris la déci­sion de quitter la France ?

Partir à l’étranger, c’était il y a long­temps déjà, bref c’était hier. Je ressen­tais le besoin de devenir le meilleur coach possible, une vraie soif de progresser. Alors, j’ai voulu voir autre chose. J’ai appris d’autres méthodes, d’autres manières de penser et j’ai aussi eu la chance de faire beau­coup de rencontres. L’idée était très simple. Intégrer le plus de connais­sances et d’expériences, puis rentrer dans mon club de Lorient. Et en fait, je ne suis jamais revenu. Cela fait plus de 25 ans que je continue d’apprendre. Je veux abso­lu­ment conserver « l’esprit du débutant ».

Lors de ta première expé­rience à l’étranger, qu’est-ce qui t’a frappé quand tu disais que tu étais un prof de tennis français ?

Lors de ma première expé­rience à l’académie Palmer à Tampa, je n’ai jamais évoqué le fait que j’étais fran­çais. D’abord parce qu’ils n’en avaient rien à foutre, là‐bas, c’est sur le terrain que l’on évalue l’efficacité ou la médio­crité de l’enseignant. De plus, avec mon accent, j’aurais eu du mal à leur cacher ma natio­na­lité. Mon trou s’est fait avec leur culture de leur ensei­gne­ment. J’ai beau­coup appris auprès des ensei­gnants de l’académie et peut‐être plus encore auprès de leurs diri­geants, Monsieur et Madame Palmer.

À ton avis, quelle est l’image que la France du tennis possède à l’étranger ?

L’image de la France à l’étranger, cela fait 1 025 fois que l’on me pose cette ques­tion. J’y ai déjà répondu 1 024 fois. Donc je vous accorde une seule réponse pour ne pas avoir à la répéter indé­fi­ni­ment. L’image de la France à l’étranger est plutôt bonne, voire très bonne. On lui recon­naît même l’excellence de sa forma­tion. Quant à leurs joueurs natio­naux, on n’en parle guère, tout simple­ment parce qu’il n’y en a aucun qui, à leurs yeux, « casse la baraque ». Vous voyez le para­doxe entre la forma­tion et la fina­lité : d’abord l’excellence, et ensuite ça se gâte…

Parmi tes expé­riences, quel est le pays qui nous ressemble le plus par exemple en termes de formation ?

Tous les pays se ressemblent. Je crois à un mixte de l’ensemble des forma­tions. Certains pays travaillent plus sur l’aspect physique, d’autres très tôt se centrent sur l’aspect mental. Encore mieux et plus promet­teur dans certains endroits, le jeune athlète peut se déve­lopper sur ces deux axes. Je pense sincè­re­ment que nos jeunes athlètes devraient voir ailleurs ce qui se passe. Attention, on parle toujours du déve­lop­pe­ment de nos athlètes plus ou moins jeunes, mais rare­ment de celui obli­ga­toire de nos ensei­gnants. Les plus « beaux » endroits tennis­tiques que j’ai pu observer se donnaient pour valeur et vertu de faire progresser les deux : joueurs et enseignants.

Comment expliques‐tu que certains de nos cadres soient plus effi­caces hors de leurs fron­tières ? Je pense forcé­ment à Tennis Canada…

Ces cadres dont tu parles, je les connais tous. Ils ont toujours été effi­caces. L’efficacité, la compé­tence s’expriment toujours mieux dans un envi­ron­ne­ment sain, et c’est ce qui leur arrive. D’ailleurs, les cadres trico­lores ne sont pas si nombreux à travailler à l’étranger. On se demande bien pour­quoi ! Tu me cites Tennis Canada. Effectivement, j’ai pu observer de près l’excellence du travail réalisé par cette fédé­ra­tion et impulsé par un Frenchie extrê­me­ment compé­tent. Pas mal, Louis [Borfiga, ndlr] ! 

Que reste‐t‐il aujourd’hui, au quoti­dien dans ta vie de coach, de ta forma­tion en France ?

Contrairement aux idées reçues, j’ai beau­coup appris lors de ma forma­tion en France. Elle me sert encore tous les jours. Je ne crache pas dans la soupe et je suis recon­nais­sant envers mon pays qui forme, je crois, de bons ensei­gnants. Mais il ne faut pas se contenter de cela. Une seule forma­tion, cela peut devenir très réduc­teur. S’inspirer de l’autre, des autres, cultiver une vision plus pano­ra­mique du monde du tennis avec ma forma­tion d’origine me permet tous les jours de mieux vivre mon métier de coach.

Quel conseil donnerais‐tu à un ensei­gnant qui serait en train de monter un projet pour partir à l’étranger ?

Pas de conseils en parti­cu­lier, sinon de se barrer le plus vite possible pour revenir le plus lente­ment possible. Moi, j’aime bien quelqu’un qui a un projet, rien que le mot déjà me plaît, alors foncez, sortez, vivez ! 

Quand tu reviens sur tes terres, est‐ce que tu es sollicité ?

Sollicité quand je reviens sur mes terres ? C’est certain, surtout pour boire des pots [rires].

Il se dit dans le milieu que les Français manque­raient de mental…

On nous le présente comme le mal fran­çais, je n’en suis pas certain. Il y a d’autres nations que la France à avoir un peu négligé cet aspect du tennis. Encore une fois, la prise de conscience de l’aspect mental, cela ne date pas d’hier.

Si on te propo­sait d’entraîner un joueur ou une joueuse trico­lore, qui choisirais‐tu et pourquoi ?

Aucun problème pour coacher un joueur ou une joueuse trico­lore, mais là encore, la ques­tion n’est pas qui, mais surtout pour­quoi. Ce n’est pas la noto­riété d’un joueur qui dicte mon choix, mais l’existence d’un projet commun. Un joueur ne fonc­tionne pas seul, pas plus qu’un coach. On s’investit ensemble, la nuance est savou­reuse. Alors bleu‐blanc‐rouge ou vert et jaune, la natio­na­lité passe en second plan. Mais si un joueur ou une joueuse trico­lore se mani­fes­tait auprès de moi, j’en serais très fier.

Quel est le plaisir typi­que­ment fran­çais qui t’accompagne, quel que soit l’endroit où tu poses tes valises ?

J’ai opté pour deux plai­sirs et deux couleurs qui m’accompagnent dans mes péré­gri­na­tions. D’abord le bleu : être loin de l’océan, ce n’est pas possible, donc retour inévi­table à l’eau, dans l’eau. Deuxième choix : j’aime bien aussi le rouge et je rends hommage à nos belles régions vini­coles de France.

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