Quand Gustavo Kuerten remporte pour la première fois Roland‐Garros en 1997, il le doit à son jeu bien sûr, mais aussi à son cordage Luxilon qui va révolutionner le tennis, comme avait pu le faire le boyau auparavant. L’ère des monofilaments polyester débute vraiment à ce moment‐là aux yeux du grand public. Depuis, elle ne s’est jamais essoufflée, surtout au plus haut niveau, permettant aux champions de frapper de plus en plus fort tout en gardant la balle dans le court. Pour comprendre le phénomène, nous avons pris le temps de joindre le président de la marque belge basée à Anvers. Nico Van Malderen nous a expliqué cette épopée avec beaucoup d’humilité et de recul, loin des paillettes des players’ lounge et des carrés VIP.
Quand la société Luxilon est‐elle née ?
En 1959. Au début, nous faisions tout simplement du fil à coudre en nylon. Ce n’est qu’en 1984 que nous avons commencé à produire des cordages. En fait, ce sont nos fournisseurs qui nous ont poussés sur ce marché en nous proposant des matières innovantes. Nous avons d’abord conceptualisé un premier monofilament qui s’appelait Orkit, mais il était trop rigide et il cassait rapidement. Nous avons donc décidé de continuer d’améliorer ce produit et c’est en 1991 que nous avons lancé le Big Banger Original.
Entre les mains de quels joueurs l’avez-vous mis ?
Albert Costa, Félix Mantilla, puis un certain Gustavo Kuerten par la suite [fin 1996, ndlr]. En ce qui concerne les joueurs du circuit, notre stratégie marketing n’a jamais varié. Nous ne payons jamais pour qu’un champion utilise notre cordage. Nous lui proposons ce que l’on appelle un échange marchandises : la quantité de ses bobines et garnitures est liée à son classement en fin d’année.
Malgré tout, on peut dire que c’est la victoire de « Guga » en 1997 qui a mis votre cordage sur le devant de la scène…
C’est surtout parce que Guga a reconnu que son jeu s’était amélioré avec l’Alu Power, qu’il avait plus de puissance et de rendement. Et comme cela se voyait aussi dans sa façon de jouer, notre savoir‐faire a été reconnu dans le monde entier. Ces succès ont donc permis d’accélérer notre développement, c’est indéniable.
En fin de compte, vous sentez‐vous responsable d’avoir changé la façon de jouer au tennis au plus haut niveau grâce à cette innovation ?
Responsable, c’est un bien grand mot. Nous avons conscience qu’une tendance s’est mise en place et effectivement, c’est aujourd’hui une grande fierté de savoir que 70 % des joueurs et joueuses du Tour jouent avec du Luxilon.
Tant que ça ?
Peut‐être même un peu plus, car je ne parle là que des joueurs que nous équipons.
Pensez‐vous que d’autres « révolutions » comme la vôtre pourraient encore transformer la façon de jouer à l’avenir ?
Nous travaillons, comme nos concurrents Babolat ou Tecnifibre, sur de nouvelles matières. Nous voulons toujours répondre le mieux possible à l’attente de nos clients, et pas seulement aux 400 joueurs professionnels. C’est aussi pour cela que notre gamme a évolué.
Que diriez‐vous à un jeune joueur qui pose votre fameuse garniture Luxilon Alu Power sur son cadre ?
Qu’il risque de se blesser suivant la tension adoptée.
Est‐il vrai que vous fabriquez aussi du boyau ?
Oui.
Avec des boyaux de vache ?
Évidemment.
Où se trouve votre usine ?
Quelque part en Europe…
Et Kuerten, vous l’avez rencontré ?
Une fois, mais bien après sa carrière professionnelle. Nous avons un accord avec Wilson depuis 2005. Nous nous concentrons sur l’innovation et la fabrication, tandis que Wilson gère le marketing et la distribution, sauf en Belgique car c’est chez nous [rires]. Cela fonctionne parfaitement bien.
Publié le dimanche 12 décembre 2021 à 13:49