Vainqueur de son 12e titre à Roland‐Garros, Rafael Nadal a surtout insisté sur sa capacité à inverser une situation qui a été difficile pour lui avant d’arriver à Paris. De quoi ce succès, le 18e en Grand Chelem, encore plus fort.
Rafa, comment expliquez‐vous votre ratio au filet avec 23 points gagnés sur 27 ?
Quand je monte au filet, c’est que je suis en bonne position, avec un certain avantage dans l’échange et j’ai une bonne volée pour finir le point. C’était important de ne pas perdre le contrôle du court face à Dominic, surtout qu’il est très puissant avec son coup droit. J’ai réussi à bien gérer la situation. Il y a eu une forte intensité dans le premier set avec des points fantastiques, mais il était impossible de tenir ce rythme. Au deuxième, on gagne assez facilement nos services et j’ai joué un mauvais jeu à 6–5. Je suis sorti aux WC et après ça je suis revenu avec des idées claires de ce que je devais faire. La clé du match a été le début du troisième set.
Vous avez vécu une année difficile, cela rend votre victoire encore plus incroyable ?
Cette année a été difficile, mais ce fut le cas l’an dernier aussi. Le début de saison a été positif sur le niveau de tennis, mais j’ai eu plusieurs problèmes comme à Indian Wells, Brisbane ou Acapulco. J’ai connu beaucoup trop de galères ces 18 derniers mois, alors ça rend ces dernières semaines encore plus spéciales.
Dans quelle mesure cela a été difficile de revenir mentalement au haut niveau ?
C’est difficile quand on a des problèmes qui s’enchaînent. Pour être honnête, après Indian Wells j’étais mal mentalement. Physiquement aussi. Comme j’avais eu trop de problèmes à la suite, j’avais perdu un peu de mon énergie. C’est un peu comme quand vous recevez des coups, vous êtes un peu groggy et vous ne savez pas trop ce qui va arriver. Mon équipe et ma famille m’ont énormément aidé. Monte‐Carlo et le début de Barcelone ont été difficiles pour moi. Je ne prenais pas de plaisir, j’étais plus préoccupé par ma santé, j’étais trop négatif. Après le premier tour de Barcelone, je suis resté seul dans une pièce à réfléchir à tout ce qu’il se passait et ce que je devais faire : soit je m’arrêtais pour que mon corps puisse se reposer, soit je changeais radicalement d’attitude et de mentalité pour jouer les semaines suivantes. Après cette réflexion, j’ai réussi à changer et me battre pour toutes ces petites améliorations. Depuis ce match contre Mayer à Barcelone, j’ai progressé tous les jours pour en arriver là aujourd’hui. Ce trophée signifie énormément pour moi, c’est une satisfaction personnelle d’avoir pu changer cette dynamique.
« Après le premier tour de Barcelone, je suis resté seul dans une pièce à réfléchir à tout ce qu’il se passait et ce que je devais faire »
Vous avez désormais 18 titres du Grand Chelem, soit deux de moins que Roger Federer…
Je ne pense pas à rattraper Roger. Je ne suis pas préoccupé par ça. On peut toujours être frustré de son voisin parce qu’il a une plus grosse maison, une plus grosse télé (rire). J’essaie juste de donner le meilleur de moi. Je me sens très chanceux de ce qui m’arrive. Si à la fin de ma carrière, je suis capable d’en gagner encore et de me rapprocher de Roger, alors ce sera incroyable. Si ce n’est pas le cas, ce restera toujours incroyable. Pour l’instant, c’est la dernière chose à laquelle je pense pour être honnête. Ce qui compte, c’est de bien jouer. Je vais faire de mon mieux pour me donner la possibilité de continuer à jouer au plus haut niveau.
Pendant longtemps, les gens disaient qu’avec votre style de jeu vous n’alliez pas durer… Qu’en pensez‐vous maintenant ?
Les gens aiment bien prévoir le futur. Quand j’entendais ça, je répondais toujours « peut‐être ». Oui, j’ai rencontré des problèmes, mais j’ai toujours trouvé un moyen de les surmonter. Je suis là, j’ai 33 ans, je profite, j’aime jouer au tennis. On verra combien de temps j’arrive à continuer de jouer.
De votre envoyé spécial à Roland‐Garros
Publié le dimanche 9 juin 2019 à 22:02