Applaudi lors de son entrée en salle de presse, Rafael Nadal a répondu aux nombreuses questions des journalistes, « sa » Coupe des Mousquetaires sous le bras. Le Majorquin a décrit le déroulé du match ainsi que les très fortes émotions ressenties lors de la remise des prix. Le numéro 1 mondial parle également des records de tires en Grand Chelem de Federer et Sampras. Entretien avec le vainqueur de Roland Garros 2014 !
Neuvième titre à Roland Garros, c’est exceptionnel, félicitations. Faut‐il que l’on renomme le tournoi Nadal Garros ?
Merci beaucoup. L’idée du nom est sympa ! Mais j’aime bien le nom de Roland Garros. Il ne faut rien changer (Sourire).
Plus sérieusement, pouvez‐nous raconter le match tel que vous l’avez vécu sur le court aujourd’hui ?
Je sais que pour battre Novak, je dois allez jusqu’à mes limites. Je sais que je dois être agressif, mais à chaque fois c’est la même chose : il faut attaquer avec une certaine confiance et pas n’importe comment. C’est vrai qu’au début, il contrôlait vraiment plus le match que moi. Je gagnais la majorité de mes points sur ses erreurs plutôt que sur mes propres coups gagnants. Je me suis dit qu’il fallait que cela change et ce, dès le deuxième set. Et puis la dynamique du match a changé, j’ai été plus agressif, j’ai fait de meilleurs coups. Et même si c’était encore très serré, à 4–4 dans le 2e set, je savais que le match avait changé de physionomie. C’était le plus important pour moi, à ce moment‐là.
« Gagner le 2e set était très important pour moi. Si je ne l’avais pas fait, je ne sais pas si je serais là, à vous parler avec ce trophée. »
Tout s’est donc joué dans le second set ?
Vous savez, les conditions étaient difficiles aujourd’hui, parce qu’il a fait très chaud et humide. Pendant toute la quinzaine, il a fait froid. On a donc subi un changement brutal de températures et ça nous a affecté, Novak et moi. Notre performance physique et notre performance en général ont été modifiées à cause de ce temps. Nous étions tous les deux fatigués aujourd’hui. Voilà pourquoi il était très important pour moi de gagner ce deuxième set, sinon je ne sais pas si je serais là à vous parler, avec la coupe à côté de moi.
Justement, comment avez‐vous vécu ce match physiquement ?
Je me suis très vite senti fatigué, presque épuisé. Je n’étais pas bien physiquement. C’est la motivation, l’envie, l’espoir de la victoire qui m’a fait tenir. Mentalement, je suis resté très fort. Je voulais vraiment ce titre. J’ai souffert mais j’ai tenu le coup.
Le fait que ça se termine sur une double faute vous empêche‐t‐il de vraiment profiter du moment ?
Non, parce qu’au moment où vous voyez que la balle sort, vous ne vous rendez même pas compte que c’est une double faute. A ce moment‐là, je me dis juste que j’ai gagné Roland Garros. Bien sûr, je suis désolé pour Novak, c’est un peu injuste ce qui lui est arrivé, avec les cris des spectateurs entre son premier et son deuxième service. Mais ça arrive parfois dans les grands stades. Je suis donc vraiment désolé pour lui, mais terminer de cette façon ou d’une autre n’avait pas vraiment d’importance pour moi.
« Les années passent. J’ai 28 ans et je sais que cela ne durera pas toujours. Je ne sais même pas si je gagnerai encore ce tournoi. C’est pour cela que j’étais si ému aujourd’hui. »
Vous étiez très ému lors de la remise des prix. Pouvez‐vous nous parler des émotions ressenties ?
C’est d’abord une victoire très émouvante pour moi vu ce qui s’est passé en Australie. Je ne sais pas si j’aurais pu battre Wawrinka en finale là‐bas, mais, comme j’étais blessé, je n’ai pas vraiment joué ce match. C’était difficile pour moi de l’accepter. Les mois qui ont suivi, j’ai un peu baissé mentalement. Mais j’ai continué à me battre, même si je ne me sentais pas assez fort. Et il y a un mois, j’ai commencé à me dire que je jouais de mieux en mieux. Ma motivation est alors revenue et je me suis automatiquement senti plus positif sur le court. Et puis j’ai gagné de plus en plus de matchs, j’ai pris confiance en mon tennis. C’est ce qui m’a permis de battre les meilleurs joueurs. Pour revenir sur l’émotion, pour moi, de toute façon, gagner Roland Garros est toujours un grand moment d’émotions. Mais les années passent. J’ai maintenant 28 ans, je sais que cela ne durera pas toujours. C’est difficile d’en prendre conscience. Alors je veux profiter de toutes les choses qui m’arrivent aujourd’hui. Je ne sais pas si je gagnerai encore ce tournoi. Et c’est aussi pour cela que j’ai ressenti un pic d’émotions. Et puis il y avait aussi plein de personnes de ma famille présentes, tout ce public qui m’a soutenu, l’hymne de mon pays… C’est pour moi à chaque fois un grand moment d’émotion que de jouer et de gagner sur ce court. C’est tout ce mix particulier qui m’a rendu si ému à ce moment‐là.
Vous n’avez pas été le seul très ému aujourd’hui, Novak a également pleuré…
Ce sont des moments pleins d’émotion, pour lui comme pour moi. Lui n’a jamais gagné ici et je crois d’ailleurs qu’il mérite de l’emporter au moins une fois parce qu’il a vraiment été régulier dans ce tournoi tout au long de sa carrière. Le fait d’être acclamé et soutenu par le public comme cela, c’est normal qu’il ait été submergé par l’émotion. C’était d’ailleurs pareil pour moi. J’avais perdu mes 4 derniers matchs contre Novak, j’ai réussi à être courageux, à prendre les bonnes décisions dans les moments clés et donc à gagner. Alors, lorsqu’on arrive sur le podium, avec l’hymne national, le soutien du public, ce court Philippe Chatrier si grand, Roland Garros avec tous ces gens, forcément on est submergé d’émotion.
« Je n’aime pas les comparaisons. Bien sûr, égaler Pete Sampras est important, mais ce qui compte le plus pour moi, c’est de gagner Roland Garros. »
Grâce à cette victoire, vous égalez Pete Sampras avec 14 titres en Grand Chelem. Est‐ce important pour vous ?
Je le dis à chaque fois : je n’aime pas ces comparaisons. Ce qui compte le plus pour moi, c’est de gagner Roland Garros. Bien sûr, le reste est important, mais à mes yeux, ça l’est moins. Ce qui est important, c’est d’avoir gagné Roland Garros. C’est la récompense ultime sur terre battue. Et puis Roland Garros est sûrement pour moi le tournoi le plus important de l’année.
Pensez‐vous égaler voire dépasser un jour le record de Federer et ses 17 titres du Grand Chelem ?
Ce serait bien mais cela ne me préoccupe pas. Ce n’est pas vraiment une motivation. Je suis mon propre chemin. Quand j’aurai terminé ma carrière, on fera les comptes. Pour l’instant, je me soucie peu des records. Je suis juste très, très content d’être arrivé à 14. De toute façon, je n’avais pas abordé le tournoi de cette façon.
Le public était partagé aujourd’hui. Qu’en avez‐vous pensé ?
Le public français est un public très important et très exigeant. Le tennis est très important en France. Les événements tennistiques sont vécus par le public d’une façon très particulière. Ce public connaît bien le tennis. Et je crois qu’il apprécie que j’adore Roland Garros. Il apprécie aussi la passion que j’éprouve pour le tennis, ainsi que les efforts que je fais tous les jours pour ce sport. Je crois que le public français ressent tout ça et y est sensible.
Bjorn Borg, une des légendes de ce tournoi, vous a remis la coupe aujourd’hui. Vous verriez‐vous, à votre tour, remettre ce trophée d’ici une quarantaine d’années ?
J’adorerais faire ça ! Je suis un fan de sport en général et de tennis bien sûr. Si j’ai la chance d’être en bonne santé, j’aimerais beaucoup revenir et remettre la coupe à mon tour.
Et maintenant le gazon : allez‐vous jouer à Halle ?
Oui, je pars pour Halle demain. J’avais déclaré forfait l’an passé, je me dois d’être présent cette fois. Je vais essayer de bien jouer à Wimbledon, c’est important pour moi. Mais je vais aussi faire attention car je veux rester en bonne santé et le gazon est la surface qui me pose le plus de problèmes au niveau de genoux. Je vais aussi surveiller mon dos, qui m’a fait mal pendant cette quinzaine parisienne. Le résultat en Allemagne ne sera peut‐être pas optimal, mais ça me permettra de voir où j’en suis au niveau de mes conditions. Et puis c’est la meilleure façon de me préparer pour ce nouveau Grand Chelem.
La nouvelle raquette de Nadal spécial French Open est arrivée
Publié le dimanche 8 juin 2014 à 23:30