Le lundi 2 juillet 2001, Roger Federer bat Pete Sampras, à Wimbledon. Le lundi 12 septembre 2011, Novak Djokovic bat Rafael Nadal, en finale de l’US Open. Dix années de tennis, dix années de Grand Chelem, chez les hommes – mais chez les femmes aussi –, qui ont offert quelques bijoux d’oppositions, quelques pièces rares qui viennent compléter une histoire bien remplie. Pour saluer cette décennie exceptionnelle, la Rédaction de GrandChelem/Welovetennis s’est attelée à la création d’un ouvrage mêlant textes et photos. Le sujet : 40 matches particuliers – beaux ou symboliques – en dix années de Grand Chelem. Parce qu’on aime ce tennis masculin en cinq manches, parce qu’on aime ce tennis féminin à enjeu. Parce qu’on aime les tournois du Grand Chelem.
L’ouvrage est désormais disponible, uniquement sur www.kdotennis.com – tirage limité.
Chez les Messieurs, Roger Federer a inauguré, sur le gazon londonien et face à Pete Sampras, une ère qui tiendra, gageons‐en, une place à part dans l’histoire du tennis. Cette victoire, cette défaite, a œuvré comme un passage de témoin entre le Prince des 90s et celui des années 2000, entre le maître et celui qui, à l’époque, n’est encore qu’un élève. Cette vérité impose, désormais, son évidence, un peu comme un roman complexe dont on découvrirait le sens au fil des années, avec le recul et la maturité. Pourtant, en 2001, c’est loin d’être le cas : Roger Federer fait partie de ces joueurs prometteurs, mais traine, derrière lui, une réputation de génie émotif, à l’« attitude de morveux, d’enfant gâté », selon Peter Lundgren. « Il souffrait de ce don » qu’il avait pour le tennis, « qui le sortait de la norme, […] et culpabilisait d’échouer. » En battant Pete Sampras, quadruple tenant du titre, Roger Federer montre, alors, à la face du monde, qu’il a choisi de changer, d’évoluer. De se sacrer champion, tout simplement. Il lui faudra encore deux ans pour mûrir et devenir adulte. Deux ans, puis un premier baiser sur le trophée de Wimbledon, que 15 autres suivront en tournois du Grand Chelem. Intouchable, durant quelques années, le Roi Roger creusa, par sa domination intelligente et créative, un fossé que les têtes princières – Andy Roddick, Lleyton Hewitt, Marat Safin… – ne purent ni franchir, ni même atteindre.
Un homme, un unique, s’éleva d’une contrée latine. Rafael Nadal. Ce fossé, il l’a sauté, puis comblé, en partie, avant de tirer Federer en arrière, par l’impact psychologique de sa domination. Il peut affirmer, à l’inverse des autres : « Sans Roger, je n’aurais jamais été aussi fort. » Rafa est l’un des personnages charnières de cette ère. Parce qu’à sa manière, il influe sur le jeu de toute une génération. Parce que sa présence concurrente crée, alors, l’une des plus grandes rivalités de l’histoire du sport, rassemblant, derrière l’un ou l’autre des protagonistes, les passions de tous les amoureux de la petite balle jaune. Parce que ses facultés de travail et d’adaptation ont ramené la lumière sur ces fondamentaux, plutôt que sur l’idée de « don ». Le travail comme fondations, en une forme d’ascèse quotidienne. Un pèlerinage.
Dans ce contexte concurrentiel irrespirable, une nouvelle présence s’est peu à peu dessinée. Novak Djokovic. Vainqueur, en 2008, de Roger Federer, pour la première fois, au meilleur des cinq manches, il remporte, la même année, l’Open d’Australie et la Masters Cup, atteignant les demies des majeurs six fois sur sept. A Melbourne, il rompt une série de 11 titres consécutifs pour les deux monstres. Si, à l’époque, il affirme « vouloir être numéro un mondial », peu sommes‐nous à le prendre au sérieux. Troisième homme, mi‐guignol, mi‐arrogant, avec son franc‐parler et ses imitations, il met quelques années à construire sa constance. La finale de la Coupe Davis 2010 joue comme un déclic, que présage une approche mathématique du jeu et de sa préparation. Apportant une précision systématique dans les éléments les plus pointus de cette dernière, jusqu’à la nutrition, il amène le tennis dans une sphère nouvelle d’engagement physique en 2011. Appuis ancrés au sol, mais aussi très véloce, le Serbe vit une année exceptionnelle. La finale de l’US Open, face à Rafael Nadal, vient clôturer une décennie de rêve et consacre l’avènement d’une ère et de rivalités nouvelles : Nadal‐Djokovic.
Si cette ère masculine, ouverte en 2001, conclue en 2011, fut le prétexte de cet ouvrage, la décennie féminine écoulée propose, elle aussi, de belles émotions, souvent mises au second plan par des Messieurs omniprésents. Tandis que ces derniers se dirigeaient vers une prédominance de la dualité dans la rivalité, le circuit de ces Dames, lui, évoluait vers l’explosion, l’ouverture, l’incertitude. A l’opposé des années 90, où les charismes ne manquaient pas. D’ailleurs, comme s’il regrettait son âge d’or passé, le circuit féminin a, surtout, été marqué par les come‐backs : celui de Martina Hingis, celui d’Henin ou de Clijsters, celui de Pierce, des Williams ou de Sharapova, après de longues ou répétées blessures… Néanmoins, quelques perles, déjà indémodables, ont été semées, ici ou là : la rivalité des sœurs Williams – en toile de fond –, peu à peu atténuée par leur implication vagabonde dans le quotidien du circuit, celle des Belges, Justine Henin et Kim Clijsters, dont on eut un revival en fin de décennie, l’avènement de Maria Sharapova et celui, tardif, d’Amélie Mauresmo…
Ces dix années nous permettent, donc, de jeter un coup d’œil dans le rétroviseur et mesurer le chemin parcouru. Et de nous pencher sur 40 matches qui ont construit, déclenché, attisé, embrasé notre amour des tournois du Grand Chelem, de ce tennis au meilleur des cinq manches, aux enceintes mythiques. « Grand Chelem, mon amour », en huit chapitres, qui nous font voyager dans nos souvenirs et émotions sportives : « Je t’aime… passionnément », pour consacrer ces matches de passion et déjà légendaires ; « Je t’aime… moi non plus », pour saluer certaines des grandes rivalités de ces dix ans passés ; « Je t’aime… au premier regard », pour nos coups de foudre de la décennie ; « Je t’aime… à la folie », pour ces matches semblant défier toute rationalité – scénario, comportement… folie ! « Je t’aime… le temps d’une chanson », pour ces passions d’une jour, un soir, une nuit, chefs d’œuvre d’une quinzaine, sans lendemain ; « Je t’aime… sans retour », pour ces finales expéditives, dans lesquelles les perdants se sont vus éconduire – ou l’idée du « râteau »… « Je t’aime… et je n’y croyais plus », pour des renversements de situation formidables – « two sets to love », on n’invente rien ; « Je t’aime… pour toujours », pour rendre hommage à quelques champions et à leur monument.
« L’amour est éternel, infini, toujours semblable à lui‐même ; il se voit en cheveux blancs, toujours jeune de cœur », disait un romancier, quelque siècle passé. Cela ne se dément pas, à chaque ère qui vient. Pour autant d’émotions ces dix prochaines années que ces dix ans passés, on signe tout de suite !
Les auteurs – Rémi Capber, Pauline Dahlem et Laurent Trupiano
Le livre « Grand Chelem, mon amour » est disponible. Retrouvez les 40 matches de légendes de la décennie 2001–2011. Un livre de la rédaction de GrandChelem/Welovetennis.
Publié le mardi 15 novembre 2011 à 12:00