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Les espoirs du tennis féminin mondial

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Elles sont les espoirs du tennis féminin mondial. Elles se sont affron­tées en finale du dernier Roland Garros Junior. A 16 ans, elles sont déjà des ambas­sa­drices de leur sport dans leur pays. Ons Jabeur et Elina Svitolina ont répondu aux ques­tions de GrandChelem/WLT avec toute la frai­cheur de leur jeune âge. Un entre­tien commenté par Luca Appino et Laurent Paillusseau, qui suivent de près ces deux jeunes prometteuses.

Un entre­tien réalisé dans le cadre du numéro 21 de GrandChelem, à retrouver ici.

A suivre : entre­tien avec Sam Sumyk.

Vous pouvez me présenter votre jeu, vos points forts, vos points faibles, qu’on fasse connais­sance avec vous ?

Ons Jabeur : J’aime bien marquer les points à la volée. Mes points forts : coup droit et revers. Mais le service commence à être aussi l’une de mes armes. J’aime faire des amortis, jouer service‐volée…

Elina Svitolina : Je ne saurais pas encore bien dire et déter­miner quels sont mes points forts et mes points faibles. Tout ce que je sais, c’est que j’ai du travail à faire en prépa­ra­tion physique et en prépa­ra­tion psycho­lo­gique. Mes surfaces favo­rites : l’herbe et, vous l’aurez deviné, la terre battue (rires). J’aime atta­quer et aller de l’avant.

Comment vous avez décou­vert le tennis ?

OJ : Mes parents jouaient au tennis. Ils m’y ont mis étant petite, avec la nata­tion, égale­ment. A l’âge de cinq ans, ils m’ont demandé de choisir et j’ai pris le tennis ! Je préfé­rais, il y avait les petites balles en mousse, les raquettes… (Rires)

ES : J’ai touché ma première raquette à quatre ans et j’ai commencé dans la foulée. Mon frère était joueur de tennis, donc j’ai été entraînée par son projet. C’était quelque chose de famille. En Ukraine, c’est le sport numéro deux, mais on n’en parle prati­que­ment jamais !

Petit retour sur votre année 2010… C’est quoi votre meilleur souvenir ?

OJ : La finale de Roland. Parce qu’il y avait beau­coup de Tunisiens pour m’encourager. Les drapeaux dans les tribunes, tout ça… J’ai un peu eu le trac en voyant ce soutien, tous ces gens qui m’encourageaient ! Le stress ! Mais ça m’a surtout donné envie de refaire ça à Wimbledon et à l’US Open et je garde d’ailleurs des supers souve­nirs de là‐bas.

Ons, tu as été surprise de ton niveau de jeu à Roland Garros, surprise d’aller jusqu’en finale ?

OJ : On s’est fixé des objec­tifs avec mon entraî­neur. Au début, on se disait quarts de finale. Puis, quand je les ai atteints, on s’est dit finale. Tout ça s’est fait petit à petit.

Et toi, Elina, ton meilleur souvenir ?

ES : De manière surpre­nante, ce n’est pas ma victoire à Roland Garros, mon meilleur souvenir. Pour moi, l’essentiel, c’est que j’ai été en forme et en bonne condi­tion physique tout au long de la saison, que j’ai pu sentir une progres­sion et une évolu­tion dans mon tennis. C’est ça, ce que je veux retenir de cette année.

Vous vous comparez avec les filles de vos âges ? S’il y a assez peu de Tunisiennes sur le circuit, il y a beau­coup d’Ukrainiennes dans le top 500, beau­coup de jeunes, en plus…

ES : Il y a des Ukrainiennes qui sont devant moi, mais en aucun cas elles ne me servent de réfé­rence. Pour être dans le top 3, il faut avoir d’autres repères. Mon ambi­tion n’admet pas que je regarde les autres, j’ai mon programme individuel.

Une idole de jeunesse, une joueuse qui vous a inspirée ?

OJ : Pas chez les filles, mais chez les garçons, oui. Roddick ! Je crois que c’est parce que mon style de jeu est un peu masculin (rires). J’aime bien marquer les points à la volée, c’est assez rare chez les filles. C’est quelque chose que je fais depuis toute petite, je veux finir le point correc­te­ment et rapi­de­ment. J’aime bien jouer en double, d’ailleurs. Attaquer et terminer le point, comme ça, c’est sympa en termes de sensations.

ES : Je n’ai jamais eu d’idoles, même main­te­nant je n’en ai pas. Je retiens plutôt des coups ou des phases de jeu chez tel ou tel joueur, des éléments qu’il maîtrise à la perfec­tion. Mais je n’ai pas une idole en particulier.

Vous avez des amies sur le circuit ? Je vous pose la ques­tion parce qu’on a tendance à dire que les joueuses, entre elles, ne sont pas toujours très sympa, qu’il y a beau­coup de rivalité…

OJ : Moi, je rigole avec tout le monde, même avec les filles que je vais affronter derrière, c’est mon atti­tude, mon carac­tère. C’est vrai que ce n’est pas le cas de toutes. Il y a des filles qui sont sympas avec moi en temps normal, mais, qui, sachant qu’elles vont m’affronter au prochain match par exemple, changent complè­te­ment d’attitude et ne me parlent plus. Mais moi, non, je ne suis pas du tout comme ça.

Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour 2011 ?

OJ : Gagner Roland Garros, c’est mon rêve, j’aimerais le réaliser ! Améliorer mon clas­se­ment WTA, être vers les 200 ou plus. Et puis, c’est tout ! (Rires)

ES : Bien jouer et ajouter un ou deux titres en Grand Chelem, chez les juniors ! Mais, surtout, sentir que je progresse dans mon jeu.

Ons Jabeur

Née le 28/08/1994, à Ksar Hellal (Tunisie)

En 2010 : titre à Antalya et Casablanca (ITF, 10 000 ), finale à Roland Garros Junior, demi‐finale à l’US Open Junior

Classement WTA fin 2010 : 601ème

Elina Svitolina

Née le 12/09/1994, à Odessa (Ukraine)

En 2010 : finale à Karkhov (ITF, 25 000 ), titre à Roland Garros Junior, titre au Gerry Weber Junior Open

Classement WTA fin 2010 : 498ème

Luca Appino, Directeur Technique National à la Fédération Tunisienne de Tennis

« Ons est une joueuse un peu hors‐normes, par rapport à ce qu’on voit actuel­le­ment. Les filles, aujourd’hui, frappent assez bien en fond de court, mais ne bougent que de manière laté­rale. Ons, elle a une bonne main et une atti­tude agres­sive, elle aime bien ça, donc on essaie de lui déve­lopper un jeu qui aille en ce sens. Il faut qu’elle se fasse plaisir en jouant, sans être gentille avec la balle. »

« Sa finale à Roland Garros a créé un engoue­ment certain en Tunisie. J’ai pu le remar­quer en faisant ma tournée des clubs. Je pose toujours la ques­tion aux jeunes que je rencontre : « Quel est ton rêve ? » Certains me répondent « être un joueur profes­sionnel », d’autres « être numéro un mondial », « gagner un Grand Chelem »… Et il y en a qui me disent : « Être comme Ons ! » (Rires) »

« Ons ne se préoc­cupe pas de l’adversaire, quand bien même elle joue­rait contre la 5ème mondiale. Elle ne s’occupe pas des clas­se­ments, elle rentre sur le court pour gagner. Aujourd’hui, en termes de niveau de jeu, je pense qu’elle vaut entre la 100ème et la 200ème place mondiale, assez tranquillement. »
« Les objec­tifs pour 2011 : récu­pérer, parce qu’elle revient de bles­sure, là. Puis la Fed Cup, viser Roland Garros et Wimbledon chez les Juniors et, suivant son état de forme, tenter des 10 000 et des 25 000 . Voire plus haut, mais ça dépendra du clas­se­ment.
»

Laurent Paillusseau, entraî­neur d’Elina Svitolina en Europe occidentale

« Pour 2011, notre objectif, c’est de rentrer au moins dans les 300. C’est un objectif tout à fait réali­sable. Elle est consciente de ses capa­cités et de son poten­tiel, mais on ne va pas non plus mettre la barre trop haut. A Elina de jouer le jeu ! »

« Il faut qu’elle se rende compte que tout est possible, à son niveau, et qu’elle peut battre des filles clas­sées 200 à 300 places devant. On l’a vu avec Caroline Garcia à l’Open d’Australie. L’écart est faible, ça dépend de sa moti­va­tion et de son jeu. Ce qui lui manque, c’est simple : l’expérience. Jouer des matches et encore des matches sur les circuits ITF ou WTA. Elle se rend bien compte que le circuit Junior est complè­te­ment diffé­rent du circuit pro : le jeu n’est pas le même, les tactiques sont diffé­rentes, l’expérience des filles en face n’a rien à voir… Elle découvre un certain niveau, mais surtout une expé­rience. »

« Il faut qu’elle progresse physi­que­ment. Mais, ça, c’est une progres­sion sans fin, de toute façon. Le top physique n’existe pas. La tactique, on l’apprend sur le terrain. J’insiste vrai­ment sur l’idée que c’est l’expérience qui fera les choses, au fur et à mesure des matches et des entraî­ne­ments. Jouer à 300 à l’heure ne lui permettra pas de gagner tous ses matches. C’est la poly­va­lence qui fera la diffé­rence et c’est ce que j’essaie de lui apporter. »

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