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Bixente Lizarazu : « Le seul sportif dont je me suis inspiré c’est Borg »

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On connais­sait sa passion pour le tennis mais c’est à la lecture de sa biogra­phie parue en avril dernier que l’on a décou­vert l’ins­pi­ra­tion spor­tive que Bixente Lizarazu était allé cher­cher dans la figure trans­cen­dan­tale de Björn Borg. On savait que McEnroe était l’idole de Pelé, Agassi celle de Jean‐Pierre Papin, pour le basque c’est donc Ice‐Borg.

Bixente, quand as‐tu commencé le tennis ?

J’ai démarré à huit ans et j’ai joué jusqu’à 13 ans. Je faisais tous les tour­nois du Pays Basque. J’étais classé 30 à 11 ans et j’ai remporté la Raquette de Bordeaux qui était un tournoi de jeunes assez impor­tant. Après ça, le foot­ball a pris beau­coup d’im­por­tance et j’ai un peu moins joué.

Dans ta biogra­phie on apprend que ton idole, c’était Borg.

Oui, et il faut même savoir que je n’ai jamais eu aucune idole dans le foot­ball. Le seul sportif dont je me suis toujours inspiré, c’est Borg. En terme de tech­nique, ça voulait dire que je faisais tout comme lui : le jeu unique­ment lifté, le revers à deux mains, les passing‐ shots, les lobs. J’avais évidem­ment la tenue Fila inté­grale. Mais je me suis surtout inspiré de lui pour l’at­ti­tude, la concen­tra­tion, cette façon d’être détaché de l’en­vi­ron­ne­ment. Toute mon approche mentale du foot­ball est tirée de cette capa­cité de faire abstrac­tion qu’a­vait Borg.

Et McEnroe ?

Je ne pouvais pas le saquer (rires). Bien sûr c’était un grand cham­pion, mais moi j’étais pro Borg, je ne voyais pas d’autre façon d’en­vi­sager le tennis que la sienne. C’était un maître.

Mais à la même époque, il y a aussi Yannick Noah.

Oui bien sûr, j’étais d’ailleurs très heureux quand il a remporté Roland‐ Garros en 1983 mais cela ne chan­geait rien, pour moi, il n’y avait que Borg. C’était un Dieu vivant, ça l’est toujours d’ailleurs et je peux vous dire que si je pouvais le rencon­trer, ce serait un grand moment dans ma vie.

Donc aujourd’hui tu joues encore à la Borg ?

Exactement. Je ne joue pas beau­coup mais je n’ai rien perdu en terme de jeu de fond de court. Par contre à la volée, je suis nul à chier (rires) Mais je cours dans tous les sens et je suis capable de tenir très longtemps.

Jean‐Pierre Papin nous parlait de cette supé­rio­rité physique des foot­bal­leurs sur les tennismen

Oui, j’ai remarqué que les foot­bal­leurs avaient un très bon jeu de jambes. On a le cuir tanné et on peut endurer les longs matches. On ne lâchera pas un point. Un peu comme Nadal.

Justement en parlant de Nadal, qu’est‐ce que tu penses du phénomène ?

Il a un super jeu de jambes, une force de carac­tère éton­nante pour quel­qu’un de 21 ans. Mais ça m’amène une réflexion. Il me semble que Richard Gasquet battait Rafael Nadal quand ils étaient jeunes et là aujourd’hui je trouve qu’il y a une grosse diffé­rence. Que se passe‐t‐il entre ce moment où les joueurs fran­çais sont cham­pions du monde junior et leur arrivée sur le circuit, je me le demande. Nadal semble avoir progressé alors que Gasquet a plus de mal à passer les étapes. Autre chose qui m’étonne, on a un tournoi du Grand Chelem qui se déroule en France et qui s’ap­pelle Roland‐ Garros et on découvre que les joueurs fran­çais ne seraient pas des joueurs de terre battue. On apprend même que la France ne serait pas assez équipée en court de terre battue. Je trouve ça très étonnant.

Est‐ce que tu discutes de tout ça avec ton ami Guy Forget ?

Non, quand on se voit, on parle de tout sauf du boulot. On partage surtout notre passion pour le surf. C’est aussi quel­qu’un avec qui j’aime échanger des points de vue. Au moment de finir ma carrière, je lui ai posé des ques­tions sur l’op­por­tu­nité de repousser les échéances de la retraite, à quel moment décider de m’arrêter.

En reve­nant sur Roland‐Garros et sur l’édi­tion de 2007, qu’as‐tu pensé de la finale Nadal‐Federer ?

Là aussi je suis un peu étonné d’avoir vu Federer lâcher l’af­faire. Ce qui est éton­nant de la part de quel­qu’un qui est quand même le meilleur joueur du monde, le numéro 1. Alors bien sûr Nadal a un jeu plus appro­prié à la terre battue et ça doit être épui­sant de le jouer parce qu’il ne donne pas un point.

Tu parlais égale­ment de retraite dans ton livre, tu parles là aussi de Borg en disant que cela t’avait servi d’ins­pi­ra­tion pour préparer l’après‐carrière.

Oui c’est vrai. D’ailleurs je suis très heureux de savoir que les affaires de Borg vont mieux. Les diffi­cultés qu’il a connues quand il a été ruiné m’ont permis de comprendre très tôt que le sport ce n’est pas Alice au pays des merveilles et qu’il faut faire preuve de curio­sité pour comprendre le monde dans lequel nous vivons (longue réflexion) On a beau­coup d’après‐midi de libre en foot­ball. Ca fait beau­coup d’après‐midi où on peut lire. (Sourires) Bien sûr chacun fait ce qu’il veut de son temps libre mais je trouve que la culture, s’in­té­resser à autre chose que le sport, ça peut aider à un moment donné.

En même temps Borg s’est remis sur patte, en cela est‐ce que les spor­tifs n’ont pas une approche intui­tive plus aiguë que d’autres dans certaines rela­tions sociales ?

Oui c’est vrai que le sport est une très bonne école pour voir à qui on a affaire. Parce que le haut niveau crée une situa­tion de stress maximum qui oblige les gens à se révéler. Moi ça m’a souvent permis de juger très vite de la qualité de mes interlocuteurs.

Tu parlais égale­ment de la culture. A GrandChelem on pense que le tennis fran­çais doit tout à Yannick Noah et à Mary Pierce, des Français de double culture, des Français du voyage, quel est ton avis ?

Je peux t’af­firmer quelque chose : si la France est cham­pionne du monde en 1998 c’est parce que les joueurs sont partis en Allemagne, en Italie et en Espagne. Ca a tout changé ! Moi en Allemagne, j’ai encore renforcé mon approche mentale pour ne plus connaître la fameuse gamberge dont parlait juste­ment Noah. Tout l’enjeu est là : il faut partir à l’étranger et prendre le meilleur de chaque pays. Il y a plein d’en­droits où se cachent des solutions.

Pour finir juste­ment, quelle solu­tion pour gagner Roland‐Garros et surtout quel(le) Français (e) pour gagner ?

Tiens on n’a pas parlé d’Amélie Mauresmo ! J’adore cette fille, autant la joueuse de tennis que la personne. C’est une fille très atta­chante et j’étais très heureux quand elle a eu de bons résul­tats l’an dernier. C’est une belle personnalité.