A l’occasion de la sortie de GrandChelem 23, Welovetennis vous propose de découvrir, cette semaine, des entretiens qui vous permettront de préparer, au mieux, le rendez‐vous de la Porte d’Auteuil.
A suivre : GC23 ; Martina Hingis ; Francesca Schiavone ; Sam Sumyk ; Alexandra Fusai ; Novak Djokovic ; Tomas Berdych ; Nicolas Mahut ; Jo‐Wilfried Tsonga ; Patrice Hagelauer/Arnaud di Pasquale ; Roland Garros : leur première fois.
La quinzaine de Roland, ce sont deux semaines cruciales dans la saison 2011 de Francesca Schiavone. L’Italienne, tenante du titre à Paris, revient, pour GrandChelem/Welovetennis, sur les enjeux à l’approche du tournoi et sa manière de gérer son nouveau statut.
Ton succès à Roland Garros a définitivement changé ta vie. J’imagine que ton retour à Paris va être particulier… Comment tu te prépares à ça ?
Tu sais, quand tu désires quelque chose, tu ne peux pas t’empêcher d’y penser. Tu travailles avec, en tête, un objectif précis. Je pense souvent à Roland Garros, bien sûr, à mon retour, etc. Mais, à mon sens, la meilleur préparation pour un sportif de haut niveau consiste à vivre le moment présent, en travaillant son jeu constamment. C’est ce que je fais, plutôt que de me projeter en permanence. Je prends mon temps, je peaufine des choses. Mais, attention, te dire que je ne pense jamais à Roland Garros serait mentir. Heureusement, j’ai toutes mes nuits pour ça ! (Rires)
On pourrait comparer ta carrière de joueuse à une étape de montagne, en cyclisme, dure, longue et pleine de rebondissemements. Aujourd’hui, tu penses en être où de cette longue course ?
Je ne sais pas. Peut‐être ai‐je déjà passé le col du Tourmalet ! (Rires) En tout cas, pour ce qui est de mon travail de fond, c’est l’Everest que je suis en train de gravir… Mais, à quelle étape j’en suis ? Aucune idée. Tout ce que je sais c’est que je grimpe, grimpe et grimpe encore. J’ai gagné une belle étape à Roland Garros, l’année dernière. Mais j’ai encore de grands défis devant moi, avec des hauts et des bas, sans aucun doute. J’ai des objectifs plein la tête. Avec, notamment, de nombreuses joueuses en ligne de mire, que j’aimerais vraiment battre sur de grands tournois.
De quelles joueuses parles‐tu ?
Je ne le dirais pas ! (Rires) Je ne veux pas qu’elles le sachent. Ma façon de leur dire, ce sera de les battre sur le court. Je communique avec ma raquette, moi !
Une victoire en Grand Chelem, ça change la vie d’une joueuse, non ?
C’est la question qu’on m’a le plus posée depuis mon succès à Paris. La réponse, elle est simple : ce qui change, c’est surtout la manière dont les gens te regardent. Ils sont curieux de savoir comment ça été possible, ce que cela te fait. Ca paraît logique. Si je croisais un athlète comme Schumacher, je ne pourrais pas m’empêcher de lui demander : « Wahou, mais comment as‐tu fait pour réussir comme ça ? C’est vraiment incroyable ! » Je comprends donc l’intêret que ça suscite. Néanmoins, pour ce qui est de mes amis ou ma famille, rien n’a vraiment changé. Ah si ! Maintenant, je paie quasiment tous les repas ! (Sourire) Et, comme ils mangent comme des ogres, j’ai intêret à gagner rapidement de nouveaux tournois pour remettre mon compte en banque à flots ! (Rires)
Défendre un titre à Roland Garros, j’imagine que ça induit un changement dans ta préparation du tournoi…
Non, je n’ai rien changé ! Je fais comme j’ai toujours fait. C’est sûr que j’ai grandi en tant qu’athlète. J’inclus donc des petites choses en plus dans mes exercices. Mais la base reste la même et mon travail physique n’a pas bougé d’un pouce.
Maintenant que tu as gagné ce tournoi, tu l’abordes de manière plus relax ou ça t’a, au contraire, donné encore plus faim ?
Ce qui s’est passé, c’est énorme ! Ca été difficile de rebondir après tant d’émotions. Mon coeur, ma tête, mon corps… J’étais dans un trop plein, je débordais littéralement de toutes ces émotions. J’étais arrivée à mon but ultime. J’aurais pu me dire : « C’est bon, tu as atteint ton rêve, c’est fait ! » Mais, avec le recul et l’expérience accumulée, j’espère maintenant accrocher une autre grande victoire. Pareille à la femme qui a beaucoup d’argent, je désire toujours plus de victoires. C’est la même chose quand tu aimes une personne. Tu n’as jamais assez d’elle-même.
Pour la première fois, tu viens à Paris en ayant beaucoup plus à perdre qu’à gagner. Ca ne te fait pas un peu peur ?
Je suis positive, je pars du principe qu’ayant déjà gagné ce tournoi, je suis en mesure de réitérer cette performance. Alors, j’avoue, j’ai peut‐être un peu peur, un peu plus de pression. Mais je prends chaque match comme une nouvelle expérience. Je retourne à Paris avec un bagage émotionnel fort, certes. Mais j’ai demandé à mon équipe de m’aider à gérer cette situation nouvelle. Nous devons rester concentrés sur nos nouveaux défis.
Tu penses quoi des propos de Maria Sharapova à ton sujet ?
Je suis désolée, mais je n’ai pas trop le temps de lire les journaux. Qu’a‐t‐elle dit sur moi ? Rien de méchant, j’espère ! (Rires)
Non, au contraire ! Elle trouve super de voir qu’une joueuse de 30 ans peut encore être 4ème au classement et avoir les résultats qu’on te connaît. Ton exemple lui donne beaucoup d’espoirs…
Eh bien ! Qu’en penser ? Merci à elle, c’est très gentil ! Mais, bon, je ne suis pas forcément un exemple à suivre. J’ai pris un peu mon temps. Je n’ai pas mené une carrière exemplaire. A mon âge, je privilégie le plaisir sur le terrain : je lâche mes coups, je m’amuse. C’est aussi pour ça que je me suis écartée de l’équipe de Fed Cup. J’ai apporté toute mon expérience à mes coéquipières. Maintenant, je pense qu’elles sont prêtes à voler de leurs propres ailes. De mon côté, il faut que je me ménage un peu. Même si, sur le terrain, je me sens beaucoup plus jeune que mon âge !
Quel âge tu as sur le court ?
Cinq ans de moins ! Oui, 25 ans, ça me paraît bien ! (Rires)
Publié le mardi 17 mai 2011 à 17:00