Le médecin coordonnateur national à la FFT et celui de l’équipe de France de Coupe Davis et du Centre technique national ont joué le jeu de l’entretien croisé pour évoquer le tennis comme un sport‐santé inégalable.
Que répondez‐vous à ceux qui persistent à dire que le tennis est un sport dangereux pour la santé ?
Anne Gires : Le tennis n’est pas dangereux si on respecte les contre‐indications (il y en a très peu) et s’il est pratiqué de manière adaptée à l’état de santé de la personne. C’est pour cela qu’il est essentiel de voir son médecin qui pourra faire un certificat pour une pratique adaptée si nécessaire.
Bernard Montalvan : Les bénéfices apportés l’emportent sans conteste sur les risques encourus, quels que soient l’âge et l’état de santé de la personne.
Est‐ce que les études sorties dernièrement vont permettre de changer cet état d’esprit ?
A.G. : Elles le devraient, puisque deux études internationales de très grande ampleur classent les sports de raquette en numéro 1 en ce qui concerne les bénéfices pour la santé avec une réduction de la mortalité toutes causes de 47 %, une réduction de la mortalité d’origine cardiovasculaire de 56 % et un allongement de l’espérance de vie de 9,7 ans.
Quel est l’objectif du programme Tennis Sport Santé Bien‐Être mis en place par la FFT ?
B.M. : L’objectif est de mettre en place des séances de tennis adaptées à tous les publics, quels que soient la condition physique, l’état de santé, l’âge ou le passé sportif. L’idée étant que les personnes y adhèrent afin qu’elles continuent sur le long terme.
A.G. : Le tennis, avec le concept du tennis évolutif qui joue sur la taille des terrains, des raquettes et des balles, présente tous les atouts : c’est modulable, c’est ludique et on obtient de la réussite dès la première séance. L’expérience montre que très peu de personnes arrêtent en cours de route et que la grande majorité n’a qu’une envie : continuer à pratiquer.
Est‐ce que vous sentez que cela « prend » au sein du corps professoral de tennis ?
B.M. : La sensibilisation des enseignants est une phase importante du déploiement. Nous avons des retours très positifs de ceux qui se sont déjà lancés dans l’aventure du sport‐santé. Le fait d’apporter du plaisir, du bien‐être et de permettre en plus d’améliorer l’état de santé de son public est très gratifiant.
Quels sont encore les points bloquants ?
A.G. : En premier lieu, les médecins ne sont pas tous sensibilisés ni formés à prescrire ou à recommander l’APS à leurs patients, alors que ce sont eux qui ont la crédibilité pour inciter leur patientèle à la pratique d’une activité sportive. Se pose aussi le problème du financement des séances : certaines municipalités et régions contribuent au financement ; certaines mutuelles intègrent la prestation sport‐santé pour proposer un remboursement. La MAIF, par exemple, propose un remboursement de 500 euros par an.
Est‐ce qu’à terme l’objectif est qu’un jour le tennis soit prescrit par un médecin ?
B.M. : La prescription de l’activité physique et sportive par les médecins est un véritable enjeu de santé publique. L’Inserm vient de faire un rapport qui en recommande la prescription systématique et aussi précoce que possible dans un grand nombre de pathologies chroniques.
Pour aider les médecins, la Haute Autorité de santé vient d’éditer un guide d’aide à la prescription des activités physiques et sportives. D’autre part, la société Vidal vient de mettre en ligne le Médicosport‐Santé avec les caractéristiques, les indications et les contre‐indications des disciplines sportives. Vous voyez que le tennis devrait bientôt être prescrit au même titre qu’un médicament.
On constate que les programmes choisis pour Tennis Sport Santé Bien‐Être relèvent souvent du tennis dit adapté. Cela veut‐il dire que le tennis « normal » n’est pas aux normes ?
B.M. : Pas du tout. Le tennis adapté permet de débuter progressivement et à un public ayant des limitations de pratiquer cette discipline tout en s’amusant dès la première séance. Mais pour un grand nombre de personnes, le tennis « normal » reste bien sûr d’actualité et il est source de bénéfices importants sur notre santé, notamment en améliorant la qualité des parois artérielles, réduisant ainsi le risque d’AVC comme en témoignent les études. Le rythme du tennis, avec une alternance de périodes d’intensité plus ou moins importante avec des périodes de récupération, est excellent.
Est‐ce que cette prise de conscience des bienfaits du tennis en tant que sport‐santé se produit dans toutes les grandes fédérations ? Sommes‐nous en avance ou pas ?
A.G. : Il semblerait effectivement que nous soyons en avance sur les autres fédérations.
Que pensez‐vous du cardio‐tennis, du fit‐tennis ?
A.G. : Un des principes d’une séance de sport‐santé, c’est de maximiser le plaisir. À chacun de choisir la discipline qui y répond à partir du moment où le deuxième principe est respecté, à savoir trouver la juste intensité pour obtenir les bénéfices recherchés sans risque.
On parle souvent du tennis pour des problèmes cardiologiques, une étude danoise parle de ces bienfaits. Faut‐il croire à cela ?
B.M. : Le tennis a des atouts physiologiques certains. On a vu son intérêt dans la prévention des AVC, mais il contribue aussi à une bonne régulation de la glycémie chez les diabétiques. Pour les diabétologues, le tennis est un sport idéal, car il combine des activités d’endurance avec des activités d’intensité un peu plus soutenue. L’activité physique est le seul traitement validé de la fatigue en oncologie et diminue le risque de récidives de certains cancers.
Enfin, le tennis, à l’inverse du jogging ou de la natation, a une composante ludique. Est‐ce là aussi un avantage santé du tennis par rapport à d’autres disciplines ?
B.M. : Pour les scientifiques, le plaisir, le jeu, le fait d’interagir entre adversaires, ainsi que le lien social, sont des facteurs qui contribuent de manière importante à notre état de santé et qui expliquent aussi le résultat des études qui classent le tennis loin devant les autres disciplines.
Publié le mercredi 1 mai 2019 à 16:02