AccueilInterviewsRégis Brunet : "Le tennis féminin a besoin d’émotions et de rivalité"

Régis Brunet : « Le tennis féminin a besoin d’émotions et de rivalité »

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Régis Brunet, Directeur de l’Open GDF SUEZ de Coubertin, fait figure d’expert dans l’événementiel du tennis féminin. Pour GrandChelem et WeLoveTennis, il revient sur les carac­té­ris­tiques de son épreuve et les enjeux de l’or­ga­ni­sa­tion d’un tel tournoi.

Un entre­tien réalisé dans le cadre du numéro 21 de GrandChelem, à retrouver ici.

A suivre : entre­tiens avec Marc Moroux, Alexandra Fusai, Ons Jabeur, Elina Svitolina et Sam Sumyk.

Comment on fait le choix d’or­ga­niser un tournoi féminin, plutôt qu’un tournoi masculin ?

A l’époque, en 1992, on voulait avoir un tournoi à Paris. Il nous fallait plusieurs éléments impor­tants. Le premier, c’est une ville attrac­tive. Le deuxième, c’est un parte­naire fort. Le troi­sième, c’est un orga­ni­sa­teur, capable d’avoir une date dans le calen­drier. Le quatrième, c’est d’avoir des joueuses charis­ma­tiques, un plateau qui tienne la route. Avec ces quatre condi­tions, on s’en sort. Nous, on était à Paris, dans un marché qui s’y prêtait, vierge de tout tournoi féminin – hors Roland Garros. Avec Martina Navratilova et Monica Seles pour la première édition, on était bon. 

Quel bilan vous dressez de votre tournoi, après bientôt 20 années d’existence ?

Aujourd’hui, le tournoi est solide et fort, parce qu’il y a un marché, un parte­naire, une ville… La WTA est contente d’avoir un tournoi à Paris, les joueuses égale­ment… Il y a une histoire, les joueuses les plus pres­ti­gieuses ont remporté l’épreuve, tout ça donne une machine qui fonc­tionne. On va vers nos 19ème et 20ème éditions, ça veut tout dire. Avec la date et la salle dont on béné­ficie, le soutien de GDF, l’aura d’Amélie Mauresmo – en tant que vain­queur, en tant que co‐organisatrice –, on peut encore avoir de belles ambitions.

Est‐ce qu’il n’est pas diffi­cile de vendre le tennis féminin, à l’heure actuelle ? On a l’impression qu’il y a de vrais manques…

Aujourd’hui, le tennis féminin a besoin d’émo­tions et de riva­lités. Il lui faut une nouvelle star : on n’a pas encore trouvé la Maria Sharapova de demain. Sharapova, c’était une icône. Elle était jeune, elle était Russe, elle habi­tait aux Etats‐Unis… Et elle a gagné Wimbledon très tôt. Ca a créé un boum, comme à l’arrivée des sœurs Williams, comme à celle des Belges, Henin et Clijsters. Aujourd’hui, on a trop vu ces joueuses, on a besoin de nouvelles stars. Wozniacki est numéro une mondiale, mais elle n’a pas encore gagné de Grand Chelem. Quand elle y parviendra, elle passera dans une autre dimension. 

Il y a des règles qu’il faudrait modi­fier pour rendre le circuit féminin plus attrayant ?

Ce sont des choses auxquelles j’ai réfléchi. Le problème, aujourd’hui, c’est que les meilleures joueuses ne se jouent que rare­ment en tournoi. Elles se retrouvent lors des Grands Chelems, aux Masters ou sur quelques épreuves des plus impor­tantes, mais c’est tout. Or, on a besoin de riva­lités et de duels entre les tops players. Moi, j’aimerais que les meilleures rentrent plus tard dans les tour­nois, qu’elles soient plus souvent exemp­tées des premiers tours. Ca leur permet­trait de jouer plus de tour­nois et de s’affronter plus souvent. Ce sont ces joueuses‐là qui font marcher les billet­te­ries, il faut les protéger. A l’heure actuelle, l’élitisme est préfé­rable au nombre ou à la globa­lité. Une autre idée : que les jeunes joueuses puissent jouer plus tôt de grands tour­nois, afin qu’elles se mesurent au haut niveau. Il y a une règle qui limite cette possi­bi­lité, entre 14 et 16 ans ; il faudra la modi­fier. Ca crée­rait une véri­table émulation. 

Est‐ce qu’il n’y a pas une diffé­rence de percep­tion de ce qu’est le spec­tacle par l’ATP ou la WTA ?

A la WTA, je crois qu’il y a une prise de conscience. Les tour­nois mettent en place des « byes ». Nous, on en a quatre, c’est déjà très bien. Allons encore plus loin dans ce sens. Ce sont des déci­sions qui mettent du temps à se prendre, mais il faut qu’on y travaille. Dans cette réflexion, la WTA joue un rôle fonda­mental. Elle essaie protéger tant les joueuses, que les orga­ni­sa­teurs. C’est impor­tant, notam­ment la protec­tion des joueuses. C’est ce qui nous permettra de voir les meilleures s’affronter.