Sur un nuage, apaisé et heureux, Jo livre son cœur et ses sensations après ce premier succès en Masters, à Paris, en France, chez lui. Entretien.
Que ressens‐tu à l’issue de cette belle victoire ?
C’est un bonheur infernal. Je n’ai même pas de mots pour décrire cette finale, c’est juste incroyable ce qui s’est passé cette semaine. Je suis arrivé dans le tournoi avec des douleurs un peu partout. J’avais mal à la cuisse, encore mal à l’épaule. Où est‐ce que j’avais mal encore ? J’avais mal presque partout. J’avais mal à la tête parce que je souffrais de ne pas pouvoir me donner à fond sur mes matches et de ne pas pouvoir jouer comme j’en avais envie. J’ai tenu le coup, je suis resté très, très solide. Dans ma tête, je me suis dit : tu as la chance d’être sur le court et il faut que tu te donnes à fond. On ne sait jamais ce qui peut arriver : tu peux gagner un ou deux matches et puis la machine va se mettre en route, ton corps va se stabiliser et tu vas tout péter. C’est ce qui s’est passé, je suis vraiment heureux.
Que représente cette victoire ?
Beaucoup de choses. J’ai gravi des montagnes pendant toutes ces années. J’ai connu des moments difficiles où on m’a presque dit que cela allait être dur de rejouer au tennis. Des moments où je jouais bien et tout d’un coup, boum, je retombais dans les travers des blessures. Cela vient concrétiser toutes ces années où j’ai été solide dans la tête. C’est juste la victoire de tout un collectif, de tous les gens qui m’ont soutenu depuis que je suis tout petit : mes parents, toute ma famille, mes entraîneurs, tous mes amis, qui sont toujours derrière moi et qui étaient là aujourd’hui. C’est génial.
Qu’est ce que tu as ressenti à la fin du match ?
Avant d’aller sur le court tout à l’heure, j’ai fait une sieste. J’ai rêvé que je gagnais et que je remerciais ma famille. Au moment où j’ai gagné, je me suis dit : « c’est incroyable, je vais pouvoir faire ça, je vais pouvoir remercier tout le monde de vive voix devant des milliers de gens ». Dire à quel point j’aime ma famille et les gens qui m’entourent.
Est‐ce que ça permet d’évacuer la frustration de ne pas avoir disputé Roland‐Garros ?
Des Roland Garros j’aurai le temps d’en jouer. Là j’ai gagné un tournoi que tout le monde rêve de gagner. Pour les Français c’est vraiment un tournoi très prestigieux. Je suis vraiment comblé aujourd’hui.
Dès mardi, tu t’envoles pour Shanghai. C’est un tourbillon incroyable ?
Oui, c’est un tourbillon incroyable tout ce qui s’est passé ces derniers moments. Il y a moins de deux ans, j’étais 250e mondial, je traînais mes baskets dans des petits clubs, des petits vestiaires, des petits tournois. J’avais déjà l’objectif d’arriver à ce niveau‐là. Aujourd’hui, j’y suis et je suis vraiment heureux de pouvoir aller à Shanghai et lutter contre les huit meilleurs joueurs du monde.
Ce titre vous donne‐t‐il une force supplémentaire ?
Forcément, il va me donner la confiance, comme à chaque victoire. Je repousse les limites. Cette semaine, j’ai pratiquement battu quatre ou cinq top 10. Radek Stepanek, c’est juste un enfer à jouer, il joue vraiment très bien. Ensuite, j’ai réussi à enchaîner sur Novak qui jouait très bien et qui ne m’a pas donné le match. Ensuite j’ai joué Andy dans un match fabuleux, à retournements. Je ne sais pas où je suis allé chercher le match, mais je suis le chercher loin, dans mes viscères. Hier, j’ai joué incroyablement bien et aujourd’hui aussi j’ai superbement bien joué contre un Nalbandian qui joue le feu et qui est vraiment difficile à déborder. Je pense que j’ai joué cette semaine le meilleur tennis de ma vie.
Cette communion avec le public, comment l’as‐tu vécu ?
C’est juste incroyable. Je l’avais annoncé avant le tournoi, je voulais que tout le monde soit avec moi, que tout le monde me pousse parce que je me sentais capable tout de même de faire de grandes choses. Je me sens capable de faire de grandes choses. J’attendais un public comme cela et ils ont été vraiment « sur‐présent ». Je vous avoue que plusieurs fois dans mes matches, j’ai eu des frissons tellement il y avait de bruit, tellement les gens m’encourageaient. Ils m’ont vraiment poussé et aidé à arriver là.
Tu es en train de devenir une star. Tu le sens ?
Une star, je ne sais pas. Je n’ai pas fait mieux que les autres joueurs de tennis français. J’ai encore beaucoup de chemin, j’ai envie de faire de grandes choses. J’ai envie de gagner la Coupe Davis, de remporter des Grands Chelem, j’ai envie de faire pleins de choses encore. Je suis très heureux aujourd’hui mais j’espère que je vais revenir fort l’année prochaine.
Tu seras demain n°7 mondial et nouveau n°1 français.
J’intègre le Top 10, c’est juste un rêve. Toutes les semaines, je pense à être n°1. Je me dis si j’étais n°1, ce serait fabuleux. C’est vraiment cela qui m’aide à avancer tout le temps, je vais continuer à essayer de penser comme cela pour essayer d’être le n°1, et être le plus haut possible.
Publié le lundi 3 novembre 2008 à 12:21