Demi‐finaliste à Roland Garros l’an dernier, la Française avait su charmer le public parisien. Pratiquant un tennis offensif, elle avait fait taire certaines critiques concernant sa capacité à jouer au plus haut niveau. La Corse sera très attendue lors de cette édition 2012 ; elle devra confirmer son nouveau statut et, pourquoi pas, aller au bout.
Sac Louis Vuitton au bras, hauts talons aux pieds, sortie tout juste du coiffeur, Marion Bartoli parade lors de la conférence de presse du dernier Open GDF Suez de Paris. « C’est drôle de voir que les journalistes sont surpris en me voyant habillée comme une femme normale », explique Marion, flashée tous azimuts par les paparazzi de la petite balle jaune. La voilà, nouvelle et seule icône d’un tennis féminin tricolore en panne de résultats. La numéro un française surfe encore, en février, sur une nouvelle image, construite par de bons mots, une attitude de gagnante, des performances régulières face aux meilleures et une constance dans le top 10. On se souvient forcément de l’interview qu’elle nous avait accordée en septembre 2007 : « Il y a des joueurs qui ont besoin de ne pas se mettre la pression et de voir match après match ; moi, j’ai toujours assumé les choix que j’ai faits et la pression que je me suis mise. »
Si ces paroles pouvaient résonner trop fort par le passé et être interprétées comme un manque d’humilité, elles ont trouvé une force supplémentaire depuis que Marion sait se jeter corps et âme dans un tennis panache hideux pour les puristes de la technique, mais qui sauve, quoi qu’on dise, l’honneur bleu‐blanc‐rouge. Il n’y a qu’à voir l’énergie dépensée tour après tour à Roland Garros, mais aussi Wimbledon, et le fameux épisode qui la voit congédier du court père et mère, trop véhéments pour comprendre ce qui motive une fille venue au tennis avant tout par plaisir du combat, soif de reconnaissance et quête d’un palmarès. « J’ai toujours voulu être la meilleure dans tout ce que je fais. A l’école ou dans les jeux auxquels je jouais, j’ai toujours cherché à gagner. »
Et, gagner, c’est aussi battre les meilleures joueuses du circuit. Comme ce fut le cas à Miami, où elle parvient à atteindre la finale en dominant la numéro un mondiale, Victoria Azarenka, invaincue depuis le 1er janvier 2013. « Je suis très heureuse de voir comment elle a évolué. J’espère vraiment qu’elle va franchir le cap de remporter un Grand Chelem. C’est une sacrée battante, parce qu’elle n’est pas aussi grande que d’autres joueuses et ce n’est pas facile de jouer à deux mains comme elle le fait. C’est une espèce en voie de disparition. » Voilà, en quelques mots, le portrait que lui dresse son idole, Monica Seles (NDLR : Marion est venue à un jeu à deux mains en voyant la joueuse slave à la télévision). Le portrait d’une fille qui a compris depuis peu de temps que séduire le public, c’est aussi trouver un terrain d’entente avec ceux qui font et défont une image : les médias.
Souriante, avenante, Marion a oublié de les considérer comme des ennemis. Elle sait même en jouer pour mieux attirer vers elle un certain confort de vie. Maîtrisant parfaitement l’anglais, elle s’est construit une image hors de nos frontières, synonyme de réussite. « J’ai un peu cet esprit à l’Américaine, où on a la philosophie du tout est possible, où l’on pense que tout est faisable et que tout peut être réalisé. En France, on a tendance à se mettre des barrières, en pensant qu’on a des limites qui ne sont pas franchissables. » Difficile d’être plus claire.
Ce nouveau dialogue avec les médias lui permet une certaine aisance dans les bons et les moins moments : les défaites sont mieux acceptées et les titres se font moins ravageurs. Faut‐il y voir un nouveau statut ? Certainement. Faut‐il y voir la possibilité d’aborder ce Roland Garros avec la légitimité d’une potentielle vainqueur, après la petite surprise de l’an dernier ? Marion, elle, y croit forcément. Elle sait aussi que ce ne sont ni son mental, ni son jeu, les clefs d’un succès Porte d’Auteuil. « Pour exprimer toutes mes capacités, il faut que je sois au top physiquement. » Si, jadis, cette phrase aurait suscité les moqueries des spécialistes, aujourd’hui, ils préfèrent se taire, poser leurs fesses en tribune et crier à tue‐tête : « Allez, Marion ! » Les temps changent, heureusement…
Publié le mardi 22 mai 2012 à 17:37