Il est facile de parler après, j’en conviens. Et je pense que ce papier va sûrement créer une énième polémique où je serai accusé de vouloir faire du clic alors même que je vais poser plusieurs questions plutôt limpides. Est‐ce que Roger Federer n’a pas pris trop de risques en voulant tout jouer, tout gagner ? Est‐ce qu’au final, ce pari ne va‐t‐il pas se retourner contre lui et pire contre son équipe ? Est‐ce que la Coupe Davis ne méritait pas quelques impasses ?
Une blessure n’est pas programmable, c’est une certitude. Mais force est de constater que Roger Federer a tiré sur la machine. Il faut dire que les enjeux étaient importants, d’abord gagner chez lui à Bâle, puis tenter à Paris de rester dans la course pour la place de numéro 1. Enfin, au Masters à Londres, de jouer la gagne parce que le Suisse est avant tout un compétiteur. On se permettra même de dire que ses plans étaient plutôt bien respectés, et notamment en matches de poule où il a été rayonnant. Après c’est le hasard ou plutôt le destin qui est venu contredire ses plans.
Et ce destin, c’est une demi‐finale face à son coéquipier Stanislas Wawrinka, fébrile en arrivant à Londres mais fringant face au grand frère, à l’idole de tout un peuple. Il y a des duels qui ont plus de sens que d’autres et je pense que celui face à Stan une semaine avant la Coupe Davis au tournoi des Maîtres sentait la poudre et ce même si les deux hommes sont amis. La bataille fut rude et pleine de rebondissements et de tensions, l’épisode que l’on nommera Mirka venant rajouter un peu de piment à une scénario déjà incroyable. Sans évoquer l’idée d’une scission ou d’une vraie engueulade entre les deux hommes, force est de constater que l’on a beau être des « amis » en dehors du court, sur le terrain, quand on est des champions, plus rien ne compte, et l’amitié est un vague souvenir. Seule la victoire est belle. On vous invite d’ailleurs à ce sujet à voir le documentaire sur Connors où Krickstein explique comment et pourquoi son match face à son ami a presque détruit sa carrière. Bref, lors de cette demi‐finale, je pense que les enjeux étaient un peu plus importants qu’une simple place en finale surtout à quelques joueurs du duel franco‐suisse à Lille.
Un forfait incompris en 2010 en barrages
On le sait, le Suisse a toujours eu un rapport spécial avec cette Coupe Davis, et on en veut pour preuve la discorde liée à son forfait pour affronter le Kazakhstan en match de barrage en 2010. Forfait qui avait entrainé une vraie révolte des médias helvétiques et par conséquent de la nation toute entière puisque la Suisse avec Wawrinka avait été reléguée en deuxième division. Sentant le vent venir, le Suisse avait vite corrigé le tir en s’engageant sur un partenariat à long terme avec l’équipe suisse où la principale avancée fut qu’il s’engage à prévenir à temps l’ensemble du team, et que celui ci ne soit pas devant le fait accompli. Cela avait donc calmé les esprits, et redoré le blason du plus grand joueur de tous les temps.
Aujourd’hui, forcément ceux qui considèrent qu’il n’a jamais vraiment joué le jeu de la Coupe Davis, et ils sont nombreux, interpréteront donc cette blessure et un forfait comme un mal nécessaire, comme une conséquence logique, un signe quasi mystique d’auto‐défense de la plus mythique des compétitions de tennis. L’autre scénario, plus probable, c’est que cette « péripétie » motive encore plus Roger à l’idée de partir au combat, de se sacrifier pour la nation. Alors si c’est le cas, personne ne pourra lui reprocher quoi que ce soit, alors il se défendra avec ses armes.
Bref, cette finale déjà monstreusement « bandante » prend une tournure dramatique. Maintenant, il faut juste espérer que Roger puisse au moins défendre ses chances car si c’est pas le cas, quoi que l’on dise, il aura manqué un rendez‐vous national historique, et cette idée de pêché d’orgueil reviendra inlassablement comme un boomerang.
Après je le répète et j’insiste, c’est assez simple de dire cela en ce lundi 17 Novembre, notamment quand tous nos Bleus se sont reposés pendant plus d’un mois, Bercy compris, n’ayant ni ambition, ni prétentions sur cette fin de saison, avec en tête qu’un objectif : la Coupe Davis.
C’est là la vraie différence entre une star alignant les succès chaque année, et nos champions, pétrifiés à l’idée de ne pas être prêts ou de se blesser sur un court. Le score final dimanche, nous donnera donc une part de vérité. La semaine va être terrible, espérons que le week‐end en soit ainsi également car comme dirait l’autre à vaincre sans péril on triomphe sans gloire.
Publié le lundi 17 novembre 2014 à 20:15