« Tout le monde parle de l’année pourrie de Roger Federer. Mais qu’en est‐il de celle de Rafael Nadal ? Si l’on s’arrête, observe et la compare à ses saisons passées, on la classerait parmi ses plus frustrantes. » Ces mots du chroniqueur James Crabtree, pour 10balls, posent une question intéressante : comment qualifier l’année de Rafael Nadal – année particulière, sommes‐nous forcés de reconnaître – ? Quels problèmes – si problèmes il y a – peut‐elle engendrer pour la suite de sa carrière ?
« Rafael Nadal s’attendait à dominer le circuit aussi longtemps que Roger l’avait fait avant lui. Il ne s’attendait pas à l’explosion de Novak Djokovic. Personne ne s’y attendait. » Connaissant un peu le bonhomme, à la Rédaction, on doute de la première phrase. Plus que « s’attendre à », il s’agit plutôt de « tout tenter pour ». Mais, pour ce qui est des deux suivantes, on approuve. Rafa a pris la tornade Djokovic en pleine poire, avec l’effet de surprise induit ; un terreau fertile pour la formation d’une blessure suintante, une sorte de traumatisme pour le Majorquin, qui s’est probablement senti, peu à peu, désarmé.
Crabtree cherche à comprendre les raisons de cette progressive impuissance : « Le jeu [de Nadal] a‑t‐il perdu un élément de surprise ? Ne bricole‐t‐il pas avec son service ? L’oncle Toni a‑t‐il poussé son neveu trop loin ? »
N’apportant aucun élément de réponse aux deux premières questions, il s’attache surtout à la troisième, faisant même des relations Rafa‐Toni l’enjeu du problème Djokovic. La cellule majorquine pourrait‐elle exploser sous les échecs répétés face à l’ogre serbe ? « On ne peut jamais savoir ce qu’il va se passer dans le futur », disait Nadal, après l’US Open. « Le temps est désormais venu, qui me voit m’affirmer et lui dire [à Toni] plus de choses que je ne le faisais auparavant. Je ne plaisante pas lorsque j’explique que, désormais, je n’hésiterai pas à lui répondre. J’ai beaucoup plus d’opinions qu’avant. »
L’enjeu : une séparation du duo Toni‐Rafa ?
Le débat est intéressant. Côté Rafael Nadal, il y a frustration : « J’ai été heureux de la manière dont j’ai joué cette année, mais pas de celle dont j’ai joué face à Djokovic. Il est ma motivation pour mieux jouer. » Or, frustration est souvent mère des plus grandes crises – Crabtree pourrait alors voir juste. Mais relativisons : l’année de Rafa reste excellente, avec un titre et deux finales en Grand Chelem, et 83% de victoires. Seul un Djokovic hors normes est régulièrement parvenu à l’évincer et le niveau montré par l’Espagnol au troisième set de la finale du dernier US Open n’incite pas au pessimisme. Pourquoi n’estimerait-on pas que la performance du Serbe, cette année, puisse accoucher d’un nouveau Nadal en 2012, travailleur infatigable, habitué à se battre et progresser pour être toujours meilleur ? Mieux, si l’avenir, ses choix et inconnues, poussent au catastrophisme à l’heure d’imaginer, un jour, la possible séparation du couple Rafa‐Toni, pourquoi n’envisagerait-on pas la fin de cette histoire comme une forme de renouveau positif, portant à la remise en question et à l’exploration de pistes nouvelles ?
Le seul réel point d’ombre, à notre sens : Rafael Nadal a construit son jeu et sa carrière sur une abnégation sans failles. Une abnégation qui lui permet de surmonter la « douleur » qu’il ressent dans son « corps », à chaque rencontre, comme il l’explique dans sa biographie, par John Carlin. Une abnégation qui fait de lui un mur toujours plus haut que l’échelle de ceux qui désirent le gravir. L’idée qu’un échange n’est jamais terminé tant que la balle n’a pas rebondi par deux fois. Si jamais la blessure causée par les coups de boutoir successifs de Novak Djokovic ne se refermait pas, si jamais elle accouchait d’une forme de résignation chez l’ami majorquin – un peu comme celle de Federer, face à lui, à Roland –, alors les supporters du numéro deux mondial auraient du souci à se faire.
Pour le reste, gageons qu’il attaquera, de toute façon, 2012 le mors aux dents, tablant, peut‐être, sur une baisse de régime de Mister Djokovic.
Vos éclairés avis sur ces questions ?
Quelques minutes des highlights de la dernière victoire de Rafael Nadal sur Novak Djokovic. C’était au Masters, l’année dernière. Rafa l’avait emporté 7–5 6–2.
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La tenue de Rafael Nadal est sur Tennis Warehouse
Publié le mercredi 2 novembre 2011 à 18:54