Santoro contre Blake, c’était le premier match de cette édition 2009 du Master 1000 de Paris‐Bercy. C’était aussi le dernier de la carrière du Magicien. Le Toulonnais est revenu en conférence de presse sur cette ultime défaite, son état d’esprit à l’heure d’entamer une nouvelle vie, ses projets et envies futurs.
Que ressentez‐vous après avoir disputé le dernier match de votre carrière ?
C’est une belle défaite, avec un match de qualité face à un bon Blake, une bonne ambiance et beaucoup de monde dans les tribunes. C’était important de jouer un match de haut niveau. C’est une si longue page qui se tourne comme si tout avait été prévu à l’avance, c’est trente ans d’une vie, trente ans consacrés au tennis. C’est aussi trente années qui sont passées extrêmement vite. Lorsqu’on est passionné, on ne calcule pas le nombre d’heures passées à s’entraîner, à voyager, à se battre sur un terrain. Tout se fait naturellement. Comme aujourd’hui, j’ai toujours donné le maximum.
Etes‐vous triste de quitter la scène ?
Il n’y a pas de tristesse, c’est une forme de soulagement. Depuis quelques mois, j’avais plus de difficultés à m’entraîner et à repousser mes limites. Lorsque j’arrive le matin à la salle de gym, c’est plus difficile d’aller travailler ce qu’on a travaillé des centaines ou des milliers de fois. Je suis allé au bout de mon combat. J’ai essayé de repousser mes limites le plus longtemps possible, de rester compétitif. Aujourd’hui, je suis content que tout cela s’arrête et que je puisse démarrer une vie nouvelle, une vie normale.
Une vie normale, c’est aussi parfois une vie banale. N’avez‐vous pas peur que l’adrénaline vous manque ?
Je n’ai pas peur, mais je pense que cela me manquera. Tous les aspects de mon métier me manqueront : l’adrénaline, le contact avec la presse, le public et l’insécurité de ce métier. Chaque semaine, on se remet en question. Chaque semaine, un classement ATP sort. Parfois on a la banane en le voyant et d’autrefois, on a les larmes aux yeux. Il existe une remise en question permanente. On prend des fessées régulièrement parce qu’on est amené à perdre. A chaque fois qu’on s’inscrit dans un tournoi, on perd à quelques exceptions près. J’ai joué en moyenne 25 tournois par an pendant 21 ans, cela doit faire 525 tournois. Et j’ai perdu 519 fois, c’est beaucoup (sourires). On doit toujours se remettre en question, essayer de progresser et d’avancer, mais cette insécurité est très riche à vivre. On ne peut jamais s’installer, se reposer et attendre que les choses passent.
On parle souvent de petite mort pour l’arrêt d’une carrière sportive. Qu’en dîtes‐vous ?
Oui, c’est un deuil qu’il faut faire même si j’ai planifié et décidé ce deuil. Beaucoup n’ont pas eu cette chance car ils ont dû quitter le circuit en raison de leur baisse de niveau ou de blessures. C’est un deuil, mais c’est aussi un soulagement de se dire qu’on va pouvoir bénéficier d’une vie plus standard. Dans le sport de haut niveau, il y a des limites physiques qu’on ne peut pas dépasser même si j’aurais pu faire ce métier un an supplémentaire. Les douleurs sont plus fréquentes que par le passé, il faut respecter son corps. Je termine 50ème, en bonne santé après 21 ans de carrière, c’est à mes yeux la fin idéale.
Qu’allez‐vous faire maintenant ?
J’aimerais découvrir d’autres aspects du monde du tennis. J’ai commencé à mettre un pied dans les médias et un autre pied dans l’événementiel avec l’Open de Moselle. J’ai beaucoup de propositions depuis la fin de l’été, mais je n’ai pas encore pris de décision. Peut‐être avec une chaîne de télévision, mais rien n’est décidé. J’aurais peut‐être besoin d’avoir une activité en dehors du tennis, mais je ne l’ai pas encore définie. D’ici Noël, je connaîtrai assez clairement mon planning pour 2010. J’ai toujours été très actif avec beaucoup de projets. Depuis quelques années, je n’ai pas que le tennis dans ma vie. Je fais d’autres choses qui m’ont permis de prolonger ma carrière. Si je n’avais eu que le tennis dans ma vie, j’aurais sûrement saturé plus tôt. Lorsque je suis à la maison, je prépare la suite, j’ai des projets avec des copains.
Avez‐vous aussi envie de transmettre votre expérience en tant qu’entraîneur ?
J’ai très envie de transmettre parce que j’essaie de me mettre dans la peau d’un joueur de 18–20 ans. Si ces joueurs sont autant perdus que moi à l’époque, il faut vraiment que je les aide. A l’époque, je ne connaissais rien au métier. On n’est pas capable de jouer son meilleur niveau quand on ne sait pas comment utiliser ses armes. J’aimerais aider ces joueurs, leur faire gagner un peu de temps mais j’en ai marre de voyager. Je ne me vois pas parcourir le monde et passer encore des dizaines de nuits dans les hôtels en 2010 pour entraîner un jeune joueur. Occasionnellement, si des joueurs me demandent, je répondrai peut‐être présent. Il y en a quelques‐uns que j’aimerais aider. Je n’envisage pas être coach en 2010 ou 2011. Peut‐être un jour, cela me démangera, mais pas pour l’instant.
Publié le dimanche 8 novembre 2009 à 20:25