Dans le numéro 73 de Welovetennis Magazine, nous avons consacré un dossier au tennis russe qui vit un véritable renouveau. Le coach de Daniil Medvedev, Gilles Cervara, sort des clichés que l’on connaît sur cette profession qui reste en mal de reconnaissance. Avec Gilles, pas de chichis ou de faux‐semblants : la parole est claire, nette, précise. Entretien.
Comment parviens‐tu à adapter ton coaching à toutes ces particularités culturelles ?
J’ai une expression pour expliquer cela : je me mets à son calibre. J’essaie de le sentir, d’aller vers son profil, de le mettre dans les conditions où je sais qu’il va être performant pour apprendre. Par moments, je le fais se confronter à des choses où il est moins à l’aise pour le stresser, le mettre un peu en danger, et ce afin qu’il puisse trouver des solutions par lui-même, qu’il ait la capacité de s’adapter et donc de progresser dans les domaines où il est moins bon.
Daniil a décrété qu’il ne voulait pas célébrer ses victoires. Comment as‐tu pris cette décision ?
Cela ne m’enchante pas vraiment, car je pense que les victoires peuvent être un peu plus partagées, les émotions davantage exprimées, sans que cela soit pris pour de l’arrogance ou de la prétention. Pouvoir libérer ce type d’émotions, c’est important au regard du travail produit pour parvenir à atteindre ces objectifs. Pour moi, les victoires pourraient être davantage célébrées, mais je crois aussi que cela peut évoluer, c’est peut‑être l’époque qui veut ça.
La relation coach‐joueur ne se joue pas seulement sur le court. T’es-tu renseigné sur la « culture russe » pour t’adapter ou même pouvoir parler de certaines choses avec lui ?
Je suis d’origine italienne, mais aussi polonaise. Je ne suis donc pas si éloigné de la Russie. En revanche, je ne parle pas russe. Ce qui est un peu idiot, puisque je côtoie beaucoup de joueurs russes et que je passe 98 % de mon temps avec Daniil. J’ai expliqué à Daniil que je ne pouvais pas apprendre le russe maintenant, car je n’ai pas beaucoup de temps, ma vie étant bien remplie. Apprendre le russe n’est pas ma priorité aujourd’hui, mais je lui ai promis que le jour où je ne pourrai plus faire tout ce qui me passionne – comme la boxe –, quand je serai vieux, je lui enverrai un message de nulle part en russe pour lui dire que j’ai bien réalisé ma promesse. C’est dans mes plans, mais dans très longtemps. D’autre part, je me documente de plus en plus sur la culture russe, car cela peut me donner des informations supplémentaires.
La Russie est aussi la patrie de la vodka. Ne me dis pas que vous fêtez vos victoires à l’eau, je ne te croirai pas !
Pour l’alcool, je suis plutôt proche de la Grèce avec le raki. En revanche, Daniil ne boit pas de vodka, enfin… pas devant moi.
Publié le jeudi 5 décembre 2019 à 15:40